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Climax de Frédéric Sojcher

Publié le 03/11/2009 par Jean-Michel Vlaeminckx / Catégorie: Critique

Entre son second long métrage, Cinéastes à tout prix et son troisième (en cours de montage), Frédéric Sojcher a tourné Climax, un court métrage inspiré de l'aventure insensée qu'il a vécu dans une île grecque. L’équipe du film Regarde-moi, en rébellion, interrompt le tournage, poussée par le désir du comédien principal de diriger l'équipe à la place du réalisateur. Une puissance sans la gloire qui s'est terminée en queue de souris pour les rebelles. Frédéric Sojcher a repris intelligemment la donne, en changeant d'équipe, hors du tumulte éolien de la dynamique de groupe qui faillit le couler dans la mer Egée. Après avoir écrit Main basse sur le film, un bouquin qui conte le processus de ses mésaventures, il a décidé, sur le mode du « screwball comedy » hollywoodien, de filmer cet épisode pas sympa de chez pas sympa avec malice (sans ridiculiser le comédien ni l'équipe). Le film s'appelle Climax, dure 14 min 49 secondes et est tourné en 35mm. Nous découvrons Jonathan, le réalisateur (excellent Laurent Deutch) qui n'arrive pas à ce que Gérard, l'acteur (Patrick Chesnais) interprète comme il le lui demande le personnage d'affreux collaborateur qu'il est devenu, livrant une famille juive à la déportation. Cinq plans. Au début, l’acteur pleure comme s’il était la victime, ensuite il fait des commentaires sans que cela figure dans le scénario initial.

Le réal : « Tu ne fais rien, tu as un regard neutre ».
L'acteur : « Oui, bon, je ne fais rien, je ne dis rien. Bon. C'est la dernière fois, ce n'est pas pour toi, c'est pour l'équipe. »
Action ! Visage neutre.


Gérard, peu inspiré, soupire : « Je ne peux pas, je trouve cela obscène ».
Coupez !

 

Gérard, aux techniciens : « Etre rien... il ressent des choses ce type... Ce n'est pas évident de comprendre ce que tu veux. Qu'est-ce que vous en pensez ? », dit-il en s'adressant à deux membres de l'équipe.
La scripte : « La première prise est bien ».
L'assistante : « Non, je préfère celle où tu parles ».
Gérard : « Ah, tu vois !»


Le réal rappelle que c'est lui qui décide de la scène qui est le moment fort du film. Le climax, ce qui lui donne un aspect émotionnel. Furieux, Gérard s'en va, rattrapé par le producteur qui essaie de le faire changer d'avis, quitte à faire un compromis, en rappelant à Jonathan qu'il n'a produit ce film que parce que Gérard est bancable et de lui rappeler que le cinéma est un travail d'équipe ! 

 

Ce film très drôle, qui évite tout cynisme, nous montre, avec élégance, l'envers du décor.
Sur les mécanismes de production d'un film lisez Manifeste du cinéaste du même auteur-réalisateur.

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