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Les Géants : critique lauréate du concours des Jeunes Critiques 2011-2012

Publié le 15/04/2012 / Catégorie: Événement

Des 30 critiques reçues participantes au concours des Jeunes critiques 2011-2012 sur le film de Bouli Lanners, les Géants, le jury a choisi son premier Prix. Charlotte Mallet participera 5 jours au festival de Cannes, tous frais offerts par le centre Wallonie-Bruxelles International.

Les 5 lauréats suivants sont :

France Sadzot : 2ème prix

Elodie Mertz : 3ème prix

Charline Cauchie : 4 ème prix

Ismaël Joffroy Chandoutis : 5ème prix

Romain Detroy : 6ème prix

Ils seront tous récompensés par de beaux et multiples cadeaux; DVD et livres sur le cinéma.

Merci à tous d'y avoir participé. Le Jury a eu la tâche difficile dans son choix tant la qualité des écrits était à la hauteur.

 


Charlotte Mallet, lauréate

Ismaël Joffroy Chandoutis, Elodie Mertz et Romain Detroy

 

Un conte, un western, un film social,… « Les Géants » de Bouli Lanners pourrait se voir attribuer de nombreuses étiquettes. Mais qu’importent les genres, qu’importent les classements ! Un bon film nous laisse des images, des sensations fugitives qui nous reprennent à l’improviste, sans raison apparente. Car lorsqu’une odeur, une situation banale nous replonge dans un film, c’est que ce dernier a réussi à capter l’essence même de la vie quotidienne, en y ajoutant bien sûr la magie nécessaire qui peut faire de notre vie une œuvre d’art. « Les Géants » est de ceux-là. Bouli Lanners a réussi à sublimer un quotidien plus que difficile et à en faire un grand film, qui se révèle être une véritable ode à l’amitié et à l’adolescence.


Il a évidemment eu la chance de trouver trois acteurs remarquables pour ce rôle. Entreprise qui a dû se révéler difficile car ceux-ci devaient non seulement rentrer dans la peau de leur personnage, mais aussi et surtout qu’une véritable alchimie visible à l’écran, presque tangible, se crée entre eux. Pari réussi pour le réalisateur ! Les jeunes interprètes sont extraordinaires par leur naturel, leur présence et leur justesse. Les deux frères, Seth et Zak, abandonnés par leur mère, livrés à eux-mêmes en pleine campagne, sont touchants de complicité. On peut lire dans chacun des regards qu’ils s’échangent l’amour inconditionnel qu’ils se portent. Afin de protéger l’autre, ils tentent de se cacher leur désespoir, de refouler leurs pleurs. Le troisième, Dany, a lui aussi ses fêlures. De sa famille, on ne sait rien, ou plutôt on préfèrerait ne rien savoir, car le seul proche qu’on lui connaisse est Angel le mal-nommé, un frère odieux et toxicomane. On se trouve ici face à un tout autre type de relation fraternelle : de l’amour et la protection, nous passons à la haine et la destruction. Sa seule apparition fait froid dans le dos, avec ses yeux rouges hallucinés et sa batte à la main, toujours prêt à frapper. Des déboires, les personnages en ont donc connus. Malgré cela, ces jeunes ados, n’hésitant pas à saccager une splendide maison de vacances, à faire des affaires avec un dealer pervers, ou encore à dévaster un champ pour échapper à la police locale, ne supportent pas l’idée de tuer un canard.


Un bien sombre tableau, donc, pour nos trois géants. Pourtant il se dégage du film une clarté et un lumineux espoir, notamment grâce aux magnifiques paysages, nous faisant redécouvrir ce qu’on suppose être notre chère Belgique qu’on a trop souvent tendance à dénigrer. Dés les premiers plans, on est frappé par la beauté qui émane de chaque image. La rivière, élément principal de cette nature omniprésente, se dévoile peu à peu à nous comme un personnage à part entière de l’histoire. C’est sur elle que reposent tous les espoirs de fuite des trois protagonistes et c’est là qu’ils viennent se réfugier lorsque le reste du monde leur est hostile. Les deux frères en viennent même, dans un mouvement qui les fait définitivement quitter l’enfance, à confier à ses eaux froides un pan entier de leur vie, sous l’approbation muette de Dany.
Cette clarté est aussi portée par la musique de The Bony King of Nowhere, bande originale réalisée par et pour le film, faisant en cela irrésistiblement penser au formidable « Into the Wild », avec lequel il partage également la beauté des paysages et l’apparence de road-movie. Car si les voitures occupent une place prépondérante dans la vie et l’œuvre de Bouli Lanners, la Toyota de son dernier long-métrage n’est là qu’au service du scénario, disparaissant après avoir rempli sa fonction.
Une histoire touchante, typique du cinéma belge, parfois dure, déjantée et surtout authentique. Une histoire qui, à l’instar de ce superbe morceau de piano interrompu brutalement par deux fois, n’est que le début d’une aventure dont le spectateur est libre d’imaginer la suite. Une aventure dont il ne sortira pas indemne.

Charlotte Mallet

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