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INSAS : Cru 2013

Publié le 11/07/2013 par Sarah Pialeprat / Catégorie: Critique

Le 27 juin, pour la première fois, les films de fin d’études des étudiants de l’INSAS sont sortis des murs de l’école. Présentés habituellement dans une salle de cours moyennement confortable durant toute une longue journée, cette année, les spectateurs ont bénéficié du bel écran du Studio des Bozar pour découvrir le cru 2013.

Au programme 5 documentaires et 5 courts métrages de fiction présentés par le directeur Laurent Gross comme un champ d’expérimentation, « des films fragiles dont personne n’a à rougir ». À manier donc avec précaution…

Force est de constater (et c’est tant mieux) qu’à l’instar des jeunes néo-Louvanistes, étudiants à l’IAD, la promo de l’INSAS semble également avoir retrouvé un peu de joie de vivre. Fini donc la violence, les maladies, les fins du monde et place à la vie, avec ses petites peines (certes), mais aussi ses petites joies.

Depuis plusieurs années, la belle initiative « Regards croisés », permettant à un étudiant de l’INSAS de partir quelques semaines loin, (voire très loin) et de revenir avec un film, produisait les meilleurs documentaires de l’école. Que s’est-il donc passé cette année pour revenir de l’étranger avec une matière si peu nourrie ? Les deux documentaires, l’un tourné à Sao Polo et l’autre à Pékin, manquaient en effet cruellement d’inspiration. Tout d’abord, la voix off redondante, témoignant naïvement du sentiment d’étrangeté, mais surtout cette manière de n’être jamais en prise avec le réel, laissaient perplexe. Seul Simon Gillard, avec Anima tourné à Ouagadougou, s’est immergé dans la terre d’Afrique, ses couleurs, sa terre, ses corps et en a rapporté de superbes images.
Restées sur le territoire, deux autres étudiantes ont voulu tenter l’aventure documentaire. Clara Alloing a donc signé l’inévitable témoignage-patrimonial-sur-la-fin-du-monde-industriel dans la Province de Liège avec Tilleur, place des Italiens. Quant à Anouk Mulard, elle est parvenue à nous séduire avec un film drôle et léger sur… la mort. À seulement 1h20 de Bruxelles, la réalisatrice a trouvé un lieu emblématique (le Père Lachaise) et un personnage fascinant : Olivier, bonhomme curieux dont la passion est de ressusciter la mémoire des oubliés du célèbre cimetière : bref, un sujet ! Chercheur, explorateur, arpenteur, philosophe, Olivier raconte, avec un goût consommé du suspense et de superbes effets dramatiques, l’histoire de Georges Cuvier, Marie Dubas, et un certain clarinettiste de jazz, Mezz Mezzrow, trafiquant de drogues à ses heures… Un très joli moment d’érudition ludique et enchantée.
Côté fiction, les étudiants se sont essayés à divers genres, film social, thriller haletant, polar et essai artico-poétique. Avec Le secret du terril, Marie Pynthe signait l’inévitable témoignage-patrimonial-sur-la-fin-du-monde-industriel, pendant que Sophie Clémentine Dubois se risquait, elle, à la comédie burlesque tendance musicale avec plus ou moins de bonheur (Le Pissenlit).
L’audacieuse Laura Meyer, qui nous avait séduit avec son documentaire Project Panda tourné à Pékin l’année passée, est partie sur les chemins de la fiction déjantée version polar en noir et blanc. L’humour et l’autodérision qui faisaient tout le charme de son premier film tombaient ici malheureusement à plat. Mais preuve que l’on peut passer avec talent du documentaire à la fiction pure, Maud Giraud (qui signait un des plus beaux documentaires de l’école, l’année passée), a su filmer avec grâce une forêt enneigée et un personnage tout en fragilité, instillant avec rien une ambiance de film d’horreur. Un moment mystérieux au cœur de la nuit presque « Shyamalanien » soufflant sans cesse le chaud et le froid.
Enfin, avec Mouettes, Zeno Graton tentait un film un peu « arty » sur le monde du théâtre et brouillait parfois joliment les pistes entre rêve et réalité, planches et plancher.

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