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Jambon d’Ardenne de Benoît Lamy

Publié le 07/06/2007 par Philippe Simon / Catégorie: Sortie DVD

Une ardeur d'avance

Après avoir sorti en DVD l’explosif et jubilatoire Home Sweet Home de Benoît Lamy, réalisé en 1972, Mélimedias nous propose aujourd’hui son deuxième long métrage de fiction, Jambon d’Ardenne, réalisé en 1978 et qui, dans une veine plus régionaliste, fait écho au propos subversif du premier.

Sorte de Roméo et Juliette de province, sans le tragique mais avec la farce en plus, Jambon d’Ardenne met en scène l’escalade d’une guerre sans merci où s’affrontent les restaurateurs d’une petite ville touristique de Wallonie. Entre fable politique un rien désespérée et comédie de mœurs qui n’hésite pas à faire gicler la sauce, il nous dépeint les ravages de la concurrence dans un monde où la loi du profit organise la vie d’une communauté. Et s’il est encore question de solidarité, c’est d’abord par défaut, tant Benoît Lamy s’attache ici à nous décrire les antagonismes commerciaux et leurs conséquences dramatiques comme étant l’expression la plus juste de la vie quotidienne en milieu capitaliste.

Réalisé avec cette impertinence de ton et cet esprit frondeur qui avaient fait le succès d’Home Sweet Home, Jambon d’Ardenne retrouve avec justesse cette dimension à la fois vivante et drôle des scènes populaires réussies. En mélangeant comédien professionnel et gens du cru, Benoît Lamy donne à son film une sorte d’authenticité qui en nuance le côté parfois trop volontaire.  Car avec son désir constant d’être au cœur du conflit, Jambon d’Ardenne souffre d’un excès de tension, d’une sorte de frénésie dans sa réalisation qui, si elle dit l’urgence du conflit à résoudre, énerve par son style « sans temps mort ».

Cinéma de l’après 68, comme disent certains, il est troublant de voir ce qui, à l’usage du temps, tient la route et demande à se redécouvrir. Jambon d’Ardenne, par son souci quasi documentaire pour ses personnages et leurs réalités, par son goût du populaire et de ses vérités, dépasse le cadre étroit d’une époque et propose aujourd’hui une parole qui n’a rien perdu de sa pertinence et trouve, par son témoignage, une gravité qu’elle n’avait pas alors.

Ce DVD s’accompagne de quelques bonus dont un court métrage « hollywoodien » de Benoît Lamy : Singing in the sun et une série d’interviews trente ans après dont on retiendra plus particulièrement celles d’Annie Girardot et de Jacques Perrin.

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