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Mademoiselle Chloé, de Rémi Durin

Publié le 08/03/2007 par Sarah Pialeprat / Catégorie: Critique

Ceci n'est pas une usine

Après Là-haut, récompensé par divers prix en 2005 (voir notre Webzine n°100), Rémi Durin nous revient avec son dernier court métrage d’animation, Mademoiselle Chloé. Comme dans son film précédent, la musique y est omniprésente. Alors que dans Là-haut, un pianiste de cinéma muet se laissait emporter par les notes vers une vie rêvée, ici, une petite fille va réinventer le monde pour le faire chanter.
Le choix d'un prénom n'est jamais banal. Rémi Durin aurait aisément pu s'en passer : il aurait pu choisir Zazie, il a choisi Chloé, seul mot qui sera prononcé, en écho…. Plus, il a choisi d'en faire un titre, Mademoiselle Chloé. Un hasard ?
Vous souvenez-vous de cet étrange instrument dans "L'Ecume des jours" qui distillait les notes et les mélanges alcoolisés, le pianocktail ? Vous souvenez-vous de l’héroïne de ce même roman devenue mythique et qui portait le nom d'un célèbre morceau de Duke Ellington ? Chloé, justement. Le monde est sans doute fait de coïncidences....
La Chloé de Rémi Durin n'est pas atteinte d'un nénuphar dans la poitrine mais de mélomanie aiguë. Elle ne joue pas du pianocktail, mais de l'usine. Chloé est une petite fille aux yeux ronds, au sourire innocent. Elle a décidé de transformer ce qui est le moins poétique, à savoir une vieille usine désaffectée, pleine de tuyaux et de lourdes machines, en caisse de résonance. Idée surréaliste s'il l'en est !
Pour l'aider, son papa est là. En expert attentif, il monte, démonte, manipule des manettes, déplace, joue du compresseur à air et du conteneur comme un chef d'orchestre d'un genre nouveau. Bien décidé à faire plaisir à sa fillette, il parvient, par ses manipulations judicieuses, à en extirper une série de sons inattendus, une sorte de concert bruitique, toute une imagerie acoustique qui n’est pas sans rappeler le doux brouhaha d’un orchestre symphonique qui cherche l’accord parfait. La vaste rumeur dans ce monde étrange et désolé devient alors un spectacle dansé et chanté en noir et blanc. D’un bout à l’autre d’un énorme et impossible tuyau, père et fille communiquent à l’aide d’un diapason et se renvoient le La. Quand le brouhaha cesse, la fillette peut enfin prendre sa flûte traversière pour…. Imaginez !
Certains resteront sur leur faim quand d'autres, plus imaginatifs, trouveront que c'est une bien jolie fin !


Mademoiselle Chloé de Rémi Durin (Court métrage d’animation - 7 min 40 - 2006)
Prix de la Communauté Française au Festival International des Ecoles de Cinéma de Huy (FIDEC) -
Prix de la meilleure bande sonore Media 10-10


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