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Papa… d'Aïcha Thiam

Publié le 11/12/2007 par Katia Bayer / Catégorie: Critique

Jugé meilleur documentaire au dernier festival Média 10-10, Papa… s’est fait repérer parmi une sélection de regards sur le réel plutôt endormis. Ce film, le premier d'Aïcha Thiam, a été réalisé dans le cadre de l’Atelier d’écriture documentaire mené conjointement par Filmer à tout Prix et Média Centre Dakar.

Une plage, une rive secrète. Autour des pieds, et entre les mains, il y a les grains de sable et les léchages de la mer. Au-dessus, c’est le vertige du ciel, du soleil et de quelques nuages. Parfois, un oiseau traverse le champ mais il est excusé. Le lieu, beau et calme, est propice au recueillement. Il y a un visage et surtout une voix-off de femme. C’est celle d'Aïcha Thiam. Pour son premier film, cette jeune femme, originaire de Dakar, a souhaité honorer la mémoire de son père disparu en s’adressant à lui à cœur et lettre ouverts. Pendant 16 ans, elle a grandi sans lui. Quand il est revenu, il était amoindri. Elle a dû faire face à un absent à nouveau présent. Le temps qu’elle s’habitue à nouveau à lui, elle l’a perdu une deuxième fois, définitivement. Hormis ses souvenirs, que reste-t-il à Aïcha ? Des regrets et des reliques. Les premiers s’expriment par des conditionnels :  « j’aurais voulu que tu me serres dans tes bras, j’aurais voulu te dire que je t’aimais », les deuxièmes appartiennent au passé mais n’en demeurent pas moins extrêmement présentes. Une paire de sandales rouges, une bouteille de parfum et un chapelet, des objets ayant appartenu au père, sont là, sur le sable dans lequel ils laissent de faibles empreintes. Mais après tout, ne sont-ils pas en eux-mêmes des traces ?

Si Papa… est si évident et si différent dans l’émotion, c’est fort probablement parce que sa réalisatrice ne parle pas de son père mais à son père. Et quand elle ne le fait pas, on imagine qu’elle continue à caresser ses souvenirs imaginaires et réels, une photo, une paire de sandales rouges, une bouteille de parfum, un chapelet, …. Désormais, elle a une nouvelle trace à laquelle elle peut se rattacher : son film.