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Pièces d'identités de Mweze Ngangura

Publié le 01/05/1999 par Philippe Deprez / Catégorie: Critique

King Kongo

Pièces d'identités débute par une réunion de sages africains dans un village perdu de la brousse. Il y est question de Mwana la fille du roi Mani Kongo, qui aurait été envoyée enfant à Bruxelles pour suivre des études chez des religieuses. Sans nouvelles de sa descendance, le vieux monarque décide de se rendre seul et en personne en Belgique.
Dés son arrivée à l'aéroport ses attributs de chef traditionnel posent problème à la douane où l'on veut lui confisquer sa coiffe en coquillage, son sceptre d'ébène ainsi que les rangs de perles qui lui barrent le torse. Commencent les premiers malentendus (aucune femme ne peut toucher les objets sacrés) et le premier consensus à l'européenne. Moyennant une forte taxe il pourra conserver ses chers symboles.

Pièces d'identités de Mweze Ngangura

Errant dans le hall des arrivées de Zaventem, Mani Kongo est accosté par un jeune métis, Chaka-Jo, qui lui propose de le conduire, en taxi pirate, dans un centre social pour Africains. Au cours du trajet le roi lui confie qu'il est à la recherche de sa fille perdue. Commence alors une longue quête doublée d'une comédie policière dans Bruxelles et plus particulièrement dans un Matongé plein de secrets et de mystères.

 

Un véritable chassé-croisé amènera notre roi à rencontrer un grand nombre de personnes, honnêtes ou non, avec lesquelles il composera sagement en vertu de leurs intérêts réciproques pour arriver à son but : retrouver la trace de sa petite Mwana.

 

Tout au long de la vision de Pièces d'identités, de Mweze Ngangura, le passé colonial des Européens est montré à travers des images d'archives judicieusement choisies, de même que la vie riche et mouvementée de la communauté africaine de Matongé à Bruxelles. Une véritable ville dans la ville qui signale son existence par quelques magasins exotiques et des affiches colorées annonçant fêtes et concerts aux noms chantants. 

 

Mais le sujet le plus fort et le plus brillamment traité est celui de l'identité. Entre faux papiers, identités maquillées, identité de l'âme et identité traditionnelle, Mweze Ngangura pose la question de savoir qui sont les gens et, sujet ô combien brûlant aujourd'hui, si toute notre existence peut ou doit être accrochée à un bout de papier au mépris de ce qui devrait en être la cause : les Pièces d'identités d'une personne avec toute sa dignité humaine.

 

Parmi les acteurs on saluera particulièrement Pierre Essomba (primé à Barcelone, Johannesburg, Carthage et Amiens), tout simplement remarquable en roi sage et philosophe, Jean-Louis Daulne très à l'aise dans celui du taximan et qui co-signe la bande son, Herbert Flack campant un commissaire ex-colonial des plus désabusés, Dominique Mesa la petite princesse Mwana, Cecilia Kankonda dont le visage et la gestuelle nous sont familières depuis les Zap-Mama et que l'on souhaiterait voir plus souvent tant sa personnalité allume l'écran, et Dieudonné Kabongo en Père Blanc jésuite au possible, aussi bon qu'à l'habitude.

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