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Sur le tournage de la websérie "Euh"

Publié le 15/04/2015 par David Hainaut / Catégorie: Tournage

La websérie, ce nouveau tremplin

Alors qu’elle continue à plancher sur ses prochaines séries télévisées, la RTBF a déjà embrayé du côté des webséries. Vérifications faites sur le tournage de Euh.

"Il faut absolument créer une émulation". Voici, autour de nous, l’une des phrases souvent entendues dans le petit milieu du cinéma belge francophone. Si, bien sûr, plusieurs manières de faire restent envisageables pour promouvoir nos talents – comme bien sûr, le passage par le court-métrage -, les petits écrans peuvent être eux aussi de possibles alliés. Raison pour laquelle la RTBF œuvre en ce moment sur la production de séries télé (de concert avec la Fédération Wallonie-Bruxelles) mais aussi, sur le genre très en vogue qu’est la websérie. Jeanne Nutte, chargée de communication pour le département RTBF Interactive, l’expliquait il y a quelques jours à nos confrères de Nostalgie : "Il y a, sans conteste, une niche à exploiter sur le web, la chaîne voulait donc s’y aventurer. Mais l’envie est aussi d’épauler une jeune génération, bien que certains projets nous arrivent de gens plus expérimentés, d’ailleurs issus de la télé. "

40 candidatures, 1 seul vainqueur
Il y a un an, la RTBF lançait donc, via sa cellule Webcréation & Transmédia, un premier appel à projets de webséries. L’objectif ? Motiver les troupes avec, comme critères, rendre un contenu belge, propice au web et donc interactif. 40 dossiers ont ainsi été enregistrés, presque tous ayant respecté le cahier des charges. Un comité de sélection, composé par la cellule webcréation de la RTBF, Fabrice Massin (Directeur de RTBF Interactive) et de Philippe Reynaert (Wallimage) en a ensuite retenu 5. Ceux-ci ont alors eu le feu vert pour tourner un pilote, avec un budget de 10 000 euros. Au final, c’est sous forme d’un concours particulièrement moderne - le lauréat étant celui récoltant le plus grand nombre de likes et de partages sur le seul réseau social Facebook ! - qu’Euh réussit à émerger, grâce à 23 000 interactions, assez loin devant ses concurrents. De quoi lui garantir le tournage de 9 nouveaux épisodes de 3 à 5 minutes. Une méthode favorisant forcément un certain type de publics, un point contesté par certains participants. Mais voilà, comme l’a précisé la RTBF, telles étaient les règles du jeu établies dès le départ, pour ce qui reste encore un laboratoire : tout reste donc améliorable à ce niveau. "Comme tout le monde effectivement, nous avons sollicité tous nos réseaux professionnels et privés"nous expliquait Brieuc de Goussencourt, lors d’une pause sur le tournage à Braine l’Alleud. Issu de l’IAD, Le réalisateur est aussi l’un des trois créateurs d’Euh, avec Gregory Beghin et Benjamin Dessy. "Des gens ont vu le pilote et cela a produit un effet boule de neige, y compris dans la presse""On a complètement joué le jeu", renchérit Mathieu Debaty, le comédien principal. "On a liké et partagé à outrance : c’était un gros boulot, surtout la dernière nuit où, accrochés à nos ordinateurs, on suivait tous ensemble les résultats. C’était particulier, mais amusant." Moins pour les quatre autres finalistes, on imagine…

"Si on trouve un public par là, pourquoi pas !"

Sur le tournage de la websérie EuhMais, au-delà de la cocasserie de son titre, l’émergence dEuh se justifie par une thématique bien dans l’air du temps - un trentenaire incapable de faire des choix et qui n’avance pas dans la vie -, de l'humour, un acteur atypique et quelques visages déjà connus (Erika Sainte – "On m’a appelé, j’ai ri et j’ai dit oui tout de suite! ", Nathalie Uffner) voire aperçus (Alain Bellot ou Gregory Beghin). Révélation paradoxale de Brieuc de Goussencourt : "Bizarrement, 

l’ordinateur n’est pas pour moi l’endroit le plus intéressant pour regarder du contenu censé, où avoir un point de vue artistique. On dirait que c’est moins sérieux de tourner une websérie qu’un court, un docu ou un long. Mais par la force des choses, comme ce canal devient incontournable, on saisit l’opportunité et si on trouve un public via cette proposition, pourquoi pas !"

L’aboulie, ce phénomène de société
Benoît, prénom du personnage central, souffre exactement d’aboulie, un véritable syndrome psychiatrique. "En fait, dès que la personne doit faire face à des choix, il imagine toutes sortes de possibilités qui s’offrent à lui, en s’inventant plein de scénarios conflictuels. Il en arrive à faire du surplace, il est tétanisé, apathique, n’a ni copine ni boulot ni projet. Scénaristiquement, c’était intéressant à exploiter, surtout que chose à souligner, on a totale carte blanche. C’est un phénomène de société qui parle à la jeune génération, celle-ci ayant parfois du mal à entreprendre les choses qui ont du sens dans la vie, à cause du fait qu’on soit sans cesse confrontés au besoin de prouver qu’on réussit. Notamment via l’image qu’on rend aux autres, à travers les… réseaux sociaux". On y revient, donc !

"On sent que des choses bougent"

Sur le tournage de la websérie EuhMathieu Debaty n’est pas un illustre inconnu. Déjà vu, justement, à la RTBF (dans la capsule Vestiaires, le Dan Late Show), il fait pour le moment parler de lui grâce à un premier one-man-show, intituléL’humoriste Anonyme, qui jouit d’un bon bouche-à-oreille. "Mais Euh est mon premier vrai tournage, puisqu’il dure 13 joursJ’aime ce personnage"dit-il,"car je me retrouve bien dans son humour absurde et décalé. Puis, comme moi, c’est un indécis qui n’a pas beaucoup confiance en lui."Inconditionnel de gens comme Benoît Poelvoorde, Albert Dupontel ou Jim Carrey, Debaty fait partie de ces comédiens humbles, bien de chez nous. "Il n’y a pas de stars en Belgique, on est tous au même niveau. Mais on sent quand même que les choses bougent, parce qu’on a beaucoup de gens talentueux chez nous. Moi, je voudrais juste un peu plus de culot et de budget."

Là où une chaîne française comme Arte développe des projets similaires pour 200 000 euros, Euh a bénéficié d’un budget relativement confortable de 100 000. "C’est suffisant car on arrive à le fabriquer, mais insuffisant car les gens y sont mal payés (sourire). Mais je ne me plains pas, c’est mieux que rien. Cela reste avant tout une belle opportunité pour des jeunes qui se lancent. Pour moi, la pression vient du fait qu’en plus d’écrire et réaliser, je produis – via sa propre société Grizzly Film - et dois donc considérer l’aspect financier. Mais nous avons bien préparé ça en amontet on bénéficie d’une équipe efficace, ce qui me permet de me concentrer sur l’essentiel et me décharge de beaucoup de stress." On signalera par ailleurs qu’en France, les tout premiers droits d’auteur liés à ce nouveau genre ont été reversés, pas plus tard que cette année.

D’autres projets sur le feu
Hebdomadaire et "feuilletonnante", la diffusion d’Euh a débuté le 26 mars dernier. Elle se poursuivra donc jusqu’au 21 mai. Uniquement sur le web ? "Ce n’est pas impossible qu’une websérie surgisse un jour en téléa encore précisé Jeanne Nuttemais la scénarisation et les moyens sont ici différents. Puis, une websérie doit sentir le web davantage que la télé, car ce n’est tout à fait pas le même esprit." Confortée par l’engouement général, la RTBF vient de lancer un second appel à projet, basé sur les mêmes conditions, en vue de lancer une deuxième websérie sur ce mode au printemps 2016. En parallèle, d’autres projets se poursuivent, comme Typique ou Le Stagiaire (avec James Deano et le jeune web-phénomène Gui-Home) voire se mettent en place, dont une websérie de Dan Gagnon, un animateur-maison. On garde forcément un œil sur tout cela.


Liens

Pour suivre les épisodes de Euh http://www.rtbf.be/webcreation/webseries/euh

Page Facebook https://www.facebook.com/euhRTBF?fref=ts

Site de la production de Euh http://www.grizzlyfilms.be/

Site du comédien principal http://www.mathieudebaty.com/

Deuxième appel (webséries) à projet de la RTBF http://www.rtbf.be/webcreation/actualites/detail_deuxieme-appel-a-projets-pour-la-webserie?id=8938471

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