Cinergie.be

Un été à la Goulette de Ferid Boughedir

Publié le 01/10/1996 / Catégorie: Critique

Parle-t-on mieux de ce que l'on connaît intimement? Pas forcémment. Preuve en est la Goulette, lieu centrifuge du nouveau film de Ferid Boughedir et port (d'attache) du réalisateur.

Une petite ville trépidante de la côte tunisienne qui a visiblement ému et marqué la jeunesse du cinéaste. Car d'emblée le réalisateur d'Halfaouine place son deuxième long métrage de fiction sous le signe autobiographique, en le dédiant à deux amis d'enfance, l'un Juif, l'autre Italien catholique.

Un été à la Goulette de Ferid Boughedir

A l'écran, les deux copains et l'auteur de confessions différentes ont été remplacés par trois jeunes filles, histoire de dynamiser les antagonismes religieux qui vont ressurgir chez les parents au moment où elles se mettent en tête de perdre leur virginité avec des garçons d'une autre communauté.
On voit clairement le point commun avec Halfaouine : la question du désir et de son assouvissement, coincé entre tradition et interdits.

Mais là où la sexualité était le moteur même du récit précédent, Un été à la Goulette en fait plutôt un passe-plat. Pour aller où? Vers les étages supérieurs, soit une fable - au demeurant généreuse - sur la fraternité entre les peuples.

Une fraternité placée sous le soleil et le plein air là où Halfaouine, à son exact opposé, avait choisi l'espace (for)clos du hammam. Car c'est toute la saveur méditerrannéenne, que Boughedir requiert à sa table. En alignant saynètes pittoresques, brèves de comptoir (" Si tu te noies, je te tue ! " hurle en maillot une mère pied-noir à son fils), et sensualité de circonstance (chute de reins à la dérobade), le cinéaste a visiblement opté pour une comédie plus douce qu'amère.
Mais à la Goulette comme ailleurs, les lendemains ont parfois la gueule de bois.

L'histoire se déroule en 67 peu avant la Guerre des Six Jours et les adolescentes rêvent de quitter ce bled, " ses rues pauvres et ses façades décaties ".
Mais le portrait que dresse Boughedir de sa ville natale n'a rien du constat social même si son film entend s'inscrire dans un contexte politique.
C'est vrai, qu' " A la Goulette, pauvres ou riches, tout le monde vit heureux ", dit le générique... 

 

Renaud Callebaut

Tout à propos de: