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Entrevue avec Xavier Diskeuve

Publié le 01/12/2002 par Jean-Michel Vlaeminckx / Catégorie: Entrevue

Xavier Diskeuve

 

Bip. Rien à faire. Quand Monsieur Bip sonne la conversation s'éteint. Une autre commence. Comme quoi il n'y a pas qu'Internet qui fait réseau. Bip, donc. Xavier Diskeuve qui nous fait face ouvre son portable. -Oui, le 25, le jour de la Noël, comment ça un plan foireux ? Pas du tout ! Si, si, je t'assure c'est pas de l'intox, le film passe sur la deux/RTBF. Clin d'oeil vers votre serviteur. Long silence. Hum, hum, d'accord, je t'envoie deux photos de La Chanson-Chanson par e-mail, tiff ou jpg ? OK - vers nous, la main sur le répondeur - on va y arriver", Oui salut. Il raccroche.

 

Xavier est né à Namur en 1962. Son premier souvenir de cinéma à pour nom Les Dix Commandements de Cecil B.de Mille. "J'avais entre sept et huit ans et j'étais terrorisé au point d'avoir fait des cauchemars de ce film que j'avais vu au balcon du "Casino", une salle de Dinant où j'habitais". Sinon, il regardait tous les samedis des films western à la télé. Habitant une ville où les cinémas fermaient les uns après les autres. "Adolescent, je me suis retrouvé sans autre possibilité que de prendre le train pour aller au Cinéma à Namur. Par compensation je lisais, avec assiduité Les Amis du film, en mémorisant tout."

 

A cela s'ajoute l'initiation au cinéma qu'un professeur dispense en classe tout en programmant des films dans un ciné-club. C'est ainsi qu'il a l'occasion de voir Tous les autres s'appellent Ali de R.W.Fassbinder et Derzou Ouzala d'Akira Kurosawa. Deux films qui vont le marquer. "Lorsque j'étais en rhéto, j'ai participé au concours des Amis du Film que Michel Paquot a gagné. J'étais assez impressionné de voir que les bruxellois qui, au même âge que moi, pouvaient fréquenter la Cinémathèque et voir quantité de films dont je n'avais qu'entendu parler !"

 

Après ses candidatures en philo à Namur, il fait une licence en Communication à l'Ulg. C'est une période particulièrement cinéphilique pour Xavier qui voit, en moyenne, chaque semaine, trois films. Un vrai cinéphile puisqu'il nous avoue : "Je notais dans un agenda tous les films que j'avais vus. C'est un comportement que j'ai toujours actuellement". Il organise un ciné-club étudiant qui n'aura pas de suite. Trente personnes s'étant déplacées pour voir Alphaville de Godard il ne renouvelle pas l'essai préférant se tourner vers l'art dramatique dans la troupe universitaire. Mais le destin ne se laisse pas dévier d'un pouce. Il choisit de consacrer son mémoire de fin d'études au magazine Visions qu'anime à l'époque Philippe Reynaert qui le prend en stage et où votre serviteur fait sa connaissance. Bain de jouvence dans le cinéma, un sujet qui se débat à toute heure du jour et du soir dans les locaux de Visions où Xavier à l'occasion de croiser Noël Godin, Henri Sonet, Louis Danvers, Philippe Elhem, Charles Tatum Jr.

 

"C'était amusant de découvrir le cycle de fabrication d'un magazine qui reposait, en partie, à l'image du cinéma belge, sur des pigistes ou des bénévoles. Tout le contraire de la salle de rédaction du Washington Post dans Les Hommes du président de Pakula". Le virus de la presse a frappé. Son second stage à Vers L'Avenir sera déterminant puisqu'il lui permettra de décrocher un emploi au quotidien pour alimenter les pages régionales. 1986. Le premier Festival du Film francophone de Namur lui permettra de glisser sa signature dans les pages cinématographiques et de participer au journal du Festival. C'est parti mon kiki ! La page cinéma de Vers L'avenir est restructurée, couvrant notamment les tournages qui ont lieu dans la région et que Xavier suit avec passion.

 

Deux rencontres vont être décisives pour lui : celle de l'équipe de C'est arrivé près de chez vous (Poelvoorde, Belvaux, Tavier sont namurois), dont il sera le seul à suivre le tournage. Non seulement il découvre qu'on peut tourner avec une caméra à l'épaule en 16mm mais la sélection du film au Festival de Cannes lui permet de s'y rendre et de découvrir le tremplin que représente pour le cinéma ce Festival qui voit se mélanger les cinéphiles et les acheteurs du monde entier. Deuxième déclic, Benoît Mariage, photographe à Vers l'Avenir qu'il côtoie donc quotidiennement, avec lequel il réalise de nombreux reportages "à propos desquels Benoît fera des films pour la série "streap tease". Je vais le voir, petit à petit, bifurquer vers la fiction. Il s'est mis à écrire un scénario de long métrage : Les Convoyeurs attendent. Cela a été très long. A un moment, on se rencontrait tous les samedis pour développer des idées de films. Puis, il est arrivé avec le scénario d'un court, les Signaleurs qu'il a réalisé dans la foulée, ce qui m'a permis d'aller à Cannes une fois de plus puisque le film y a été sélectionné et de rencontrer  Dominique Janne, producteur à K2". A l'époque il écrivait beaucoup de fictions, participait au concours "polar" organisé par la RTBF dont il était devenu un lauréat récurrent. Janne lui propose de lui envoyer un scénario et  Nationale 4  se retrouve à la Commission de sélection mais est malheureusement refusé. Nous sommes en 1998.

 

Xavier ne se décourageant pas à l'idée d'adapter "Pascal Sevran", un texte qu'il avait écrit précédemment, il décide de le tourner en fonds propre, à l'enseigne de l'ASBL Benzine, sous le titre La Chanson-Chanson. "On a rassemblé une équipe, des professionnels nous ont apporté leur concours, Canal C a prêté du matériel. On a tourné en hiver 2001 dans la région de Namur". Refusé par la Commission pour une aide à la finition, Xavier Diskeuve termine le film (mixage, colorimétrie, kinescopage et tirage de la copie) grâce au soutien de la Ville de Namur, de la Présidence du Gouvernement wallon et de l'Abbaye de Leffe. Projeté au festival "Images 2002", à Charleroi, il fait un tabac, est montré aux festivals de Montréal, Marrakech, à Namur et remporte le prix UIP au Festival international du film de Flandres à Gand et, dans la foulée est nominé pour les European Academy Awards décernés à Berlin en février 2003.

 

Xavier Diskeuve envisage la réalisation d'un deuxième court dont le titre (provisoire) serait Je m'appelle Jacques et qui serait centré sur Jacques, l'un des deux personnages que l'on a pu découvrir dans La Chanson-Chanson (le cousin taciturne qui emmène Walter à l'émission "la chanson Chanson").

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