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Tournage de "Jacques a vu" de Xavier Diskeuve

Publié le 15/09/2013 par David Hainaut / Catégorie: Tournage

Le journaliste devenu réalisateur

Cette fois, c’est fait ! En bouclant le tournage de Jacques a vu, Xavier Diskeuve est entré dans le cercle très restreint des réalisateurs belges de longs métrages. Si le nom de Xavier Diskeuve évoque, en tout cas pour l’instant, davantage que son visage, c’est parce que ce quinquagénaire s’est surtout illustré en écrivant, comme journaliste ou comme auteur (des nouvelles et des sketches), et en réalisant des courts métrages.

Depuis 2002, il a en effet signé quatre films petit format - dont Mon cousin Jacques -, qui se sont vus primés jusqu’à Montréal et diffusés sur un large rayon à l’étranger, via les France Télévision et de TV5 Monde. Dans un genre, précisons-le, difficile et relativement peu exploité ici : la comédie.

Une vocation née sur un tournage

Cet été, il nous semblait symbolique de nous rendre sur le tournage de son premier film. La raison ? Depuis 1985, ce néo-réalisateur a lui-même souvent sillonné de nombreux plateaux, (ceux de C’est arrivé près de chez vous ou des Randonneurs) pour L’Avenir, journal où il est actuellement en pause-carrière, le temps d’achever le montage de son film.

« J’ai effectivement couvert beaucoup de films, mais sur ceux-là, et surtout le deuxième, j’y suis resté plusieurs jours. C’est à ce moment-là que je me suis rendu compte qu’en fait, un réalisateur ne faisait pas forcément que tenir une caméra. Qu’il était là avant tout pour diriger des acteurs et gérer une équipe, dans le but de rendre une histoire cohérente au final. Et je me suis dit qu’un jour, je pourrais peut-être bien le faire. Le métier de scénariste m’avait d’abord intéressé, mais comme on le sait, ce statut n’est pas vraiment reconnu en Belgique. Et c’est dommage. »

Certes, pour parvenir un jour à ses fins, à son rêve même, il savait que, sans la moindre expérience à son actif, il allait devoir s’armer de beaucoup de patience. Et surtout, faire ses gammes. Ce qu’il allait faire pendant une décennie dans le court métrage avant d’acquérir une certaine légitimité.

 

Sur le tournage de Jacques a vu © Cinergie

 

« Il fallait que je fasse cet écolage, tester des genres, des mouvements, commettre des erreurs même… En 2006, après mon troisième court, Révolution, j’avais déjà imaginé un long, Le Stagiaire. Mais le projet a capoté financièrement et ça m’a bloqué. Ce n’est qu’un an plus tard que les prémisses de ce film-ci se sont déclenchées en moi, un soir où j’ai entendu un appel à projets de séries de la RTBF. J’ai d’abord imaginé un feuilleton rural en six épisodes, avant de le muer en un film. Par miracle, il a reçu l’indispensable sésame de la Commission du film, et j’ai pu entamer le financement.»

Sans grande surprise, le pitch de Jacques a vu est une sorte de prolongement de l’univers et l’esprit qui ont fait le succès de ses courts métrages en festivals. Il narre le destin d’un couple de citadins qui s’installe dans un petit village de campagne et dont l’intégration va vite se révéler délicate. Leur maison à peine achetée, ils apprennent qu’un gigantesque centre de vacances pour touristes hollandais va voir le jour à deux pas de chez eux !


« J’ai défendu l’idée d’un casting belge »

Sur le tournage de Jacques a vu

 

Le casting est complètement belge, puisqu’on retrouve dans les rôles-clés des comédiens comme Christelle Cornil, Nicolas Buysse et François Maniquet. Des noms bien connus du milieu, mais peu, voire méconnus du grand public. Le trio pourtant, ne fut pas simple à réunir : l’actrice tournait au même moment dans le dernier film des Frères Dardenne, Deux jours, une nuit, aux côtés de Marion Cotillard, le deuxième, accaparé par son activité théâtrale et le troisième, connu comme chercheur émérite à l’UCL, n’avait que 20 jours à consacrer à la comédie sur… toute l’année.

"Mais il me les fallait absolument tous les trois et l’été était propice. Ça n’a pas été simple à faire comprendre aux financiers, j’ai défendu l’idée d’un casting belge avec des gens qui ne sont pas des stars. Je voulais faire un film de troupe, un peu à l’ancienne. Un comédien trop connu aurait pu déséquilibrer cet ensemble, comme cela arrive dans plein de films. Mais j’ai ajouté quelques autres : Olivier Leborgne, André Lamy, Renaud Rutten, Olivier Massart, Nathalie Uffner, Alexandre Von Sivers, Jean-Luc Fonck, Eric Larcin, Christophe Bourdon… »

Côté technique Jean-Paul de Zaetijd, le chef-opérateur lauréat d’un Magritte pour Les Géants de Bouli Lanners, et son fidèle cadreur, Damien Chemin, réalisateur d’A Pelada, sorti cet été. «Forcément, du coup, on n’a reçu moins d’argent (NDLR: le budget du film n’est que d’un petit million d’euros) et on a eu plus de pression, puisqu’on devait impérativement tourner en 30 jours ce qu’on tourne normalement en 40!»


Pourtant, lors de notre visite, l’ambiance sur le set était au beau fixe. Ce jour-là, les acteurs principaux s’étaient donnés rendez-vous dans une vieille ferme typique, dans la campagne namuroise. «J’ai heureusement commencé les repérages du film il y a plus de deux ans. Ce ne fut pas simple de dénicher une ferme comme celle que je voulais encore en activité, car la plupart sont aujourd’hui rénovées pour devenir des habitations ou des gîtes.»


Un scénario construit comme une BD

Sur le tournage de Jacques a vu

 

En lisant le scénario, qui rappellerait un album de Tintin, pas mal d’anecdotes font écho au vécu du réalisateur. «C’est vrai, et si je ne suis pas un rural, j’avais des cousins fermiers et je connais bien cet univers que j’adore. Comme moi, beaucoup de gens peuvent facilement s’y reconnaître. Il suffit de voir le succès de certaines émissions agricoles (sourire). En fait, quand vous réalisez, il y a un peu tout votre subconscient et votre patrimoine qui remontent à la surface. Ce que vous avez adoré, par exemple les gags lus dans Spirou et Fantasio ou Lucky Luke ou encore, l’ambiance de films provinciaux comme chez les frères Cohen, forme ce mélange qui donne votre patte personnelle.»

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