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Stéphane Aubier et Vincent Patar

Publié le 30/11/1999 par Jean-Michel Vlaeminckx / Catégorie: Entrevue

Stéphane Aubier et Vincent Patar ne sont pas que les réalisateurs de Pic Pic André, dont vous avez pu ou pourrez voir les courts métrages d’animation et pouvez suivre chaque semaine le strip publié dans Télé-Moustique. On leur doit aussi une série hors norme dans l’animation, tant au niveau de l’image que du son : Panique au village. Nous sommes heureux de pouvoir vous présenter Trésor d’indien, l’un des épisodes d’une série dont la suite est en train de devenir un long métrage. Entretien avec des réalisateurs en pleine activité créatrice.

Stéphane Aubier et Vincent Patar

Cinergie : Panique au village fête ses quinze ans d’existence. Comment l’idée vous est-elle venue ?
Stéphane Aubier : En 1991, j’ai fait Panique au village à La Cambre, en dernière année. J’essayais de trouver quelque chose de singulier. En observant des petits bonhommes en plastique fabriqués pour les enfants l’idée m’est venue. Je les ai repeint en couleur mate pour qu’ils ne brillent pas. Pour les petits personnages de ferme c’est le genre d’objets qu’on trouve le plus facilement dans les magasins.

C. : Est-ce Vincent Tavier qui a eu l’idée d’en faire une série ?
Stéphane Aubier : On se disait que si on voulait vivre de notre travail, en racontant des histoires, il faudrait qu’on trouve une technique toute simple. On avait commencé avec Pic Pic André. C’était une couleur pour le cheval : le rouge et un décor tout simple. On se disait que si l’on voulait faire quelque chose on devait faire en sorte que cela ne coûte pas cher. Lorsqu’on a sorti la K7 vidéo de Pic Pic André, on a placé ce vieil épisode de Panique au village pour compléter la K7. Vincent à vu cela et s’est dit : « C’est génial, il y a moyen de faire quelque chose, essayons d’en faire une petite série ! »
Vincent Patar : On a un peu compris  comment fonctionnait l’animation, que le dessin animé traditionnel est  quelque chose de laborieux. Depuis le début on cherche à raconter le plus facilement possible des histoires sans devoir passer par une technicité lourde. Panique au village s’y prête vraiment bien. Plus encore que Pic Pic André qui était déjà simplifié, tout en gardant une rigueur dans l’animation. On essaye de garder une fraîcheur, une spontanéité.

 

C. : Vous êtes davantage dans le bricolage que dans l’animation informatique ?
S. A. : Pour nous le mot bricolage a toujours été extrêmement significatif. Les gens autour de nous qui doivent nous aider sont des bricoleurs. Ils doivent pouvoir improviser rapidement. Si on a besoin d’une table, d’une chaise, ils prennent deux ou trois crayons, ils découpent, ils rajoutent de la couleur dessus.
V.P. : C’est ce qui permet de garder une dimension humaine dans le travail. C’est le bricolage qui donne un coté vivant et réel aux personnages.

 

C. : Sauf exception, vous travaillez toujours avec les mêmes protagonistes ?
S.A. : Au début, à chaque épisode, on voulait un univers différent. Puis on s’est rendu compte que c’était impossible. Donc, la solution était de se concentrer sur les personnages principaux, Coboy, Cheval et Indien et d’y ajouter un petit monde autour d’eux. D’où, l’idée de rajouter le fermier et la fermière, des animaux par rapport au premier épisode de 1991. Ensuite, le petit gendarme au milieu qui fait la liaison avec le tracteur sur la route. A partir de cela, on avait beaucoup plus de cartes pour évoluer dans notre univers.
V.P. : Dans le cadre d’une série, imaginer, chaque fois un univers et des personnages différents à chaque épisode c’est comme si on remettait en chantier, un nouveau court métrage. Economiquement parlant ce n’est pratiquement pas possible. Cela coûterait aussi cher qu’un long métrage. L’idée était disposant d’un budget réduit de se servir plusieurs fois du décor créé pour raconter le maximum de choses dans cet espace avec les mêmes personnages.
S.A. : Et puis, lorsqu’on  utilise toujours les mêmes personnages, les gens peuvent plus souvent s’attacher, on peut développer le caractère de chacun.

 

C. : A la rentrée on présente, en ligne, sur notre site,  Le Trésor de l’indien, un épisode de Panique au village. La chute, on ne va pas la raconter, nous a complètement bluffés. L’idée de ce parcours en jeu de piste de Coboy est très amusante.
S.A. : Un jeu de pistes ? (rires). C’est sûrement un souvenir de gosses. Le Trésor de l’indien  faisait partie d’une série de scénarios pour constituer de 20 épisodes. Oui, c’est un jeu de pistes. Où va-t-il aller. Le problème, justement, c’était la chute. C’est au cours d’une discussion avec Vincent qu’on a trouvé la roue de secours qui est la fin.

 

C. : Comment se passe votre collaboration avec Vincent Tavier et Guillaume Malandrin ?
V. P. : C’est Stéphane qui dessine le story-board et ensuite on discute ensemble. On met les idées sur la table. Lui et moi on regarde si les dessins fonctionnent ensemble. Vincent et Guillaume viennent relire, on en rediscute. C’est donc par petites touches successives que cela se met petit à petit en place.  On a trouvé un bon rythme de travail et cela se passe bien.

 

C. : On imaginait que vous utilisiez l’ordinateur mais on s’aperçoit que vous dessinez chaque plan comme les cases d’une bédé avant d’entamer la phase bricolage
V.P. : C’est un peu le même principe que certaines bandes dessinées : l’image avec le texte en dessous.
S.A. : Vincent et moi, on a du mal à raconter une histoire écrite. On l’a fait pour la série parce que ce sont des films de cinq minutes et que cela n’occupait pas trop notre temps. Mais on a vite besoin de repasser au dessin pour retrouver des idées. Pour le long métrage de Panique au village, il y a une étape d’écriture du scénario ne fut-ce que parce que tout le monde n’est pas habitué à lire des story-board. Mais c’est un « work in progress » où tout fonctionne en même temps jusqu’au moment où l’on est derrière la caméra. Le scénario est sans cesse remodulé. De même que la mise en scène va nourrir l’histoire. Le texte n’est pas suffisant pour nous. On a besoin des images pour voir clair.

 

C. : C’est autre aventure qu’un long métrage
S. A. : On est partis dans l’idée de raconter une histoire qui tienne 80 ou 90 minutes.
V.P. : C’est nouveau, pour nous parce que cela fait quinze ans qu’on raconte des histoires courtes. On avait un univers qui nous plaisait vraiment bien, une technique qui nous permet de raconter rapidement les choses. C’est donc moins casse-gueule que mettre en chantier un truc très lourd en dessin animé ou avec des marionnettes très sophistiquées.
S.A. : On a toujours eu le projet de dépasser le standard des cinq minutes par épisode. Notre idée était d’en faire un 26 minutes.
V.P. : Et puis, on voulait développer le dialogue. Les voix étaient importantes dans les courts mais le dialogue en lui-même n’apporte pas énormément de choses dans la compréhension du récit. Elles soulignent juste  le caractère des personnages.  Dans le cadre du long on peut et on doit développer les dialogues.

 

C. : Où en êtes-vous ?
S.A. : Cela fait deux ans et demi qu’on est dessus. On commence à avoir une bonne base de travail. On a trouvé la colonne vertébrale de notre film, maintenant il faut étoffer les personnages.

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