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Les Chemins de Barbara de Christian Mesnil

Publié le 01/07/2005 par Sarah Pialeprat / Catégorie: Critique

Les Chemins de Barbara, un film de Christian Mesnil

 

 

Il aurait pu pleuvoir ce matin, mais c’est sur le soleil que j’ai ouvert les yeux... qu’importe ! Dans une heure, j’ai rendez-vous au Théâtre Mercelis avec « La Longue Dame Brune », et même s’il est vrai que la pluie est ce qui lui va le mieux, j’ai l’impression curieuse que c’est à elle que les rayons sourient aujourd’hui. Voilà près de huit ans qu’elle nous a quittés. Pleuvait-il ce jour-là sur le cercueil noir comme son piano ? Non, c’était un de ces jours où le ciel ne sait pas décider, un de ces jours sans temps qui ouvre le film de Christian Mesnil, Les chemins de Barbara.

 

Il était un fois un enterrement, il était une fois une fugitive vêtue de noir. Il pleut sur la vitre du train qui la conduit de Paris à Bruxelles. L’essuie-glace balaie lentement les « larmes de pluie ». Partir, c’est mourir ? Envolée, disparue... n’en a-t-il pas toujours été ainsi avec cette nomade qui cultivait avec art le mystère et aimait tellement disparaître pour pouvoir réapparaître. Nous la suivons sur les chemins... « J’ai peur, j’avance. J’avance, j’ai peur », peut-on découvrir dans les pages de ses mémoires interrompus sur cet exil bruxellois. La faim, la solitude, le manque, mais une chose essentielle, toujours, « la folie de chanter ».

 

De Paris à Bruxelles, de Bruxelles à Charleroi, Barbara construit cette image qui restera indélébile. Elle se fait des amis ici et là. Ceux qui l’ont rencontrée dans cette « période belge » ne parlent que peu de sa vie, mais bien plutôt d’un sillage, une silhouette, une impression. « A Charleroi, La Mansarde reste comme une clairière, une belle saison où fleurissent des âmes joyeuses et claires. » Le film ne tente pas de percer à jour le mystère, d’éclairer les points d’ombre et les détails, il lui laisse au contraire toute la place, il la laisse chanter. Les yeux braqués dans les nôtres, elle a appris au cours de ses rencontres à être à tous mais surtout à chacun. Elle est une femme qui chante jusque dans ses rares confidences, dans ses soupirs, dans ses silences. Le réalisateur a trouvé là le ton juste, la note pourrait-on dire... Les chemins de Barbara sont sinueux, inégaux, pleins d’angles et de tournants mais ne mènent qu’à une destination, la musique. Le film est une lettre d’amour pudique, un hommage respectueux, un tête-à-tête réussi avec le spectateur.

 

Un 78 tours tourne... la voix s’élève, une prière. En sortant du Théâtre Mercelis, je me dirige vers la chaussée d’Ixelles, un bout du chemin de Barbara. Le ciel s’est voilé et une petite pluie m’accompagne. Son quartier d’autrefois, Ixelles, a bien changé. Le cabaret Le Cheval Blanc a disparu, les petites boîtes de nuit près de la porte de Namur sont fermées depuis longtemps... Quelque chose pourtant me la rappelle: il pleut.
« Mon Dieu que c’est joli, la pluie ! »

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