Bruxelles sauvage : le retour des corbeaux, de Bernard Crutzen

À partir du constat du retour du corbeau freux dans la capitale, le film se voit comme une sorte de portrait ornithologique d'une ville étonnante, bardée de mystères avec ses nombreuses espèces volatiles présentes. Suite à un décret sur la protection des espèces, le nombre d'oiseaux n'a eu de cesse d'augmenter, créant parfois des tensions avec l'espèce humaine ou au contraire attirant de nombreux photographes animaliers passionnés qui tentent de prendre les plus beaux clichés. 

Centrée sur la présence des corvidés, notamment les corbeaux et les corneilles, Bruxelles sauvage : le retour des corbeaux fait un détour par l'histoire de la symbolique du corbeau dans la culture. Messager des dieux dans la Grèce antique, il perd en notoriété et en positivité à la suite du mythe de l'Arche de Noé où envoyé en éclaireur pour découvrir de nouvelles terres après le déluge, il ne revint jamais, préférant se délecter des cadavres dus à la catastrophe. 

Le cinéaste interroge la question de la bétonisation de la ville qui empêche les oiseaux de faire leur nid et parfois de se nourrir. Il souligne également les tensions entre la protection des oiseaux dont les corvidés et la rénovation des bâtiments dans une logique écoresponsable et moins énergivore qui entraînent de graves conséquences notamment pour les oiseaux migrateurs qui après des milliers de kilomètres parcourus ne retrouvent plus leurs cavités habituelles dans les façades pour y loger. 

La mise en scène se veut à la fois poétique et didactique portée par une voix off. L'un des aspects les plus riches du film est d'établir un pont entre les nombreuses espèces exotiques et souvent considérées comme invasives et les migrations humaines. L'apparition à Bruxelles d'espèces non indigènes, perruches, bernaches du Canada ou oies d'Égypte a créé des conflits non seulement avec les espèces endémiques, mais aussi avec les humains qui les voient d'un mauvais œil, les considérant comme sources de nuisances notamment sonores. Les corbeaux et corneilles sont également friands du contenu des sacs poubelle, les déchirant rendant ainsi les rues souvent sales. Ce rejet des espèces exotiques, colorées rappelle le rejet de l'étranger, des migrants. Mais comme nous devons nous habituer aux oiseaux venus de loin, nous devons accepter la présence des personnes qui ont fui leur pays. Le plus souvent, ils resteront et il s'agit de les accueillir et d'établir un pont avec eux. 

Bruxelles sauvage : le retour des corbeaux est enfin une balade insolite dans des endroits méconnus de la cité. On y découvre ou redécouvre sous un angle nouveau des parcs, des églises, des monuments connus ou méconnus, des pâturages et des marais urbains. On y parle architecture, botanique et urbanisme pour une visite inédite et curieuse de la belle Bruxelles.