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Ordinary Man de Vincent Lannoo

Publié le 10/07/2005 par Sarah Pialeprat / Catégorie: Critique

Projeté lors de la journée de la Communauté française au Festival du Film Européen de Bruxelles, Ordinary Man de Vincent Lannoo a secoué nombre de spectateurs. On vous en donne un premier avis avant sa sortie en salles au mois de novembre. Notons que le public du Festival a été particulièrement séduit par ce film et lui a octroyé son Prix.

Humour noir très noir...
Ordinary Man de Vincent Lannoo

Ç'aurait pu être un thriller américain : le titre déjà, Ordinary Man n'est pas un hasard.

 
Ç'aurait pu être un thriller américain avec tous les ingrédients oh combien nécessaires et, certes efficaces. Imaginez seulement. Un tueur-séquestreur comme on en a croisé chez Jonathan Demme, les moments de surprise façon John Carpenter qui vous font malencontreusement arracher l'épiderme du bras de l'inconnu assis à côté de vous, la petite scène gore qui donne des haut-le-coeur, le revenant-zombie-imaginaire à la Shyamalan, les enquêteurs, les leitmotiv, l'attente, l'angoisse....bref tout y est. Ç'aurait pu en effet et cela ne l'est pas, car voilà, Ordinary Man est le second long métrage de Vincent Lannoo, jeune réalisateur belge. Qu'est ce que ça change me direz-vous ? Tout !

 

Le tueur-séquestreur l'est ici bien malgré lui et s'excuse longuement dans un français châtié ("  je regrette amèrement ") de ce qu'il est obligé de faire, si sincère, si touchant avant d'assommer sa victime et après aussi d'ailleurs...."vraiment pardon". Le lieu de séquestration, théâtre d'effroi et de claustrophobie propice à de longues scènes d'angoisse voire de suspens haletant lorsque la victime va tenter de s'échapper in extremis, se réduit ici à un coffre de voiture avec couverture de survie, livres, petites lumières et...champagne à Noël. Décidément, le tueur belge est un gentleman. Le sang gicle inévitablement lorsque l'on tente d'atteindre les cordes vocales par la cloison nasale avec un petit bâton en bois. Enfin, c'est ce que j'ai cru, car j'avoue qu'à ce moment-là, j'ai dû fermer les yeux. L'inévitable leitmotiv qui ajoute à l'effroi est, outre une biche en décomposition dans la forêt,  une tourte au lard !

 

Bref, vous l'aurez compris, Vincent Lannoo nous plonge dans un univers particulier, loin des clichés et des bons sentiments avec humour, cynisme mais aussi réalisme. Et c'est bien là toute la réussite du film : un audacieux mélange des genres. L'irrévérence et l'impertinence ne font pas peur au jeune cinéaste et c'est tant mieux !  Du thriller au drame familial, de la science-fiction à la comédie, le film bascule et nous surprend... Où tout cela nous mènera t-il ? Jusqu'au bout bien sûr.  Jusqu'au-boutiste donc l'instinct de survie qui anime Georges, magnifiquement incarné par Carlo Ferrante, jusqu'au-boutiste la soumission muette de Christine, alias Christine Brulois parfaite de bout en bout quoique peu loquace, et pour cause. Près de ces personnages principaux ambigus gravitent des seconds rôles qui ajoutent au burlesque : inoubliable visage de Yolande (Emmanuelle Mathieu) l'employée du magasin.....

 

On trouvait déjà dans Strass, le premier long métrage du réalisateur, cet humour grinçant et corrosif, il  se confirme ici d'une très belle façon.

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