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Knor ou Un amour de cochon de Mascha Halberstad

Publié le 13/02/2023 par Kevin Giraud / Catégorie: Critique

Deux bouchers d’un autre temps, deux enfants curieux, et un cochon crotteur en cours de dressage. Et tout ce petit monde réuni autour d’un concours de saucisses. Voilà le tableau de maître que nous dresse la Néerlandaise Mascha Halberstad pour ce premier long-métrage, présenté en avant-première au Festival Anima 2023. Une gourmandise parfaitement maîtrisée, entre comédie animalière et film d’horreur pour végétariens.

Knor ou Un amour de cochon de Mascha Halberstad

Après une cuisante déconfiture au 75e concours des bouchers de la ville, deux artisans rivaux ont suivi des chemins différents. L’un s’est aigri, resté au pays, tandis que l’autre a parcouru le monde, devenant soi-disant le grand-père le plus cool du village. Lorsqu’il rentre au pays, c’est pour y retrouver Babs, sa petite fille. Végétarienne, comme ses parents, mais qui rêve d’un chien pour l’accompagner dans ses après-midis. Un chien, non, mais pourquoi pas un cochon ? Et peut-être cela servira-t-il les desseins pas si nets du grand-père…

Premier long-métrage en stop-motion de l’histoire des Pays-Bas, Knor regorge d’idées visuelles innovantes et drôles, tout en se reposant sur un scénario haletant digne des grands films du début du siècle. En termes de technique, on ne peut s’empêcher de penser bien sûr aux poules de Chicken Run et à la stop motion du studio Aardman, mais l’animation de Knor adopte un style bien différent. Chaque personnage a une texture très particulière, où le textile et les poils occupent une place prépondérante. On ne peut dès lors qu’être amoureux de ce petit Babe en devenir, aussi mignon que dégoûtant. Car la cinéaste prend un plaisir évident à nous traîner dans la crotte, la boue et les substances plus ou moins ragoûtantes, tandis que les poils de moustache reluisent autant que les crânes dégarnis. Il y a dans cette animation une vibration permanente, qui donne un souffle de vie captivant aux personnages. Le raffinement des fleurs et du potager, la variété des costumes, et le soin apporté aux détails font toute la saveur de Knor. L'œil attentif y reconnaîtra même les jouets de son enfance, ou peut-être ces petits détails qui font toute la richesse de l’animation en volume. Ces mini-bretelles, ce petit banjo plein d’entrain, ou ces chemisiers splendides.

Tantôt franchement hilarante, tantôt attendrissante, Knor est une bouffée d’air frais et de rires dont la qualité ne pourra que vous ravir. Et au détour des ambiances feutrées de nuit ou de coucher de soleil, magnifiquement mises en lumière par une équipe bourrée de talent, vous reconnaîtrez peut-être également cette citation de E.T., l’un de ces nombreux clins d'œil qui parcourent le film et qui en font un divertissement de grande qualité. Un film aussi lumineux dans ses ambiances qu’à travers de sa ribambelle de décors et de marionnettes, jusqu’à l’apothéose d’un final digne des plus rocambolesques slapsticks. Une œuvre qui s’avère aussi douce qu’intrigante, avec une bonne dose d’espièglerie, et de caca aussi.