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Le comédien Carlo Ferrante

Publié le 08/03/2007 par Katia Bayer / Catégorie: Entrevue

Ses blagues ont décidé de dépasser de ses poches et ses yeux, de pétiller comme des aspirines effervescentes mais sans le même effet ! Il aime son métier, et le fait savoir avec une élégante subtilité. Carlo Ferrante, c’est ce mec aux rôles souvent décalés : un duelliste peureux (Rendez-vous), Georges, qui craque, qui craque, qui… (Ordinary Man), Richard, l’humain pas spécialement affolé d’avoir de beaux bois de cerf sur la tête (Le Généraliste), le directeur d’une école de théâtre qui pratique le Dogme à la belge (Strass), le présentateur d’une émission télé qui allie frites et grand public (Congorama),… Adepte du non-jeu anglo-saxon, il cherche à mener un travail continu et évolutif dans des histoires de cinéma, courtes comme longues. Pour cela, il faut des réalisateurs avec lesquels il se sent en phase et des scénarii dans lesquels il se reconnaît. Petits bonheurs pluriels : Pierre Duculot, Renaud Callebaut et Damien Chemin ont pensé à lui pour leurs projets respectifs en cours ou à venir. Petit gros plan, en prélude.

Vécu 1 : incognito.
Quand les gens me voient, ils ne me reconnaissent pas. Par exemple, ils me disent qu’ils ont vu Ordinary Man, le film de Vincent Lannoo et que c'est trash. Je leur réponds : “Je sais, je jouais dedans” et  eux me lancent : « ouais, allez, tu déconnes, toi! (rires) »

Les détails.

« Quand je joue, je n'ai jamais envie d’être vraiment moi-même, comme si on disait : "Carlo Ferrante fait du Carlo Ferrante". Je n’aime pas trop la facilité, j'essaie toujours de rajouter des petits détails, comme dans Dernier Voyage [de Pierre Duculot] où je me suis dit que je ferais bien un personnage un peu méticuleux, donc mine de rien, j’arrange le col de ma veste ou je range des petites choses…. Même si personne ne le voit, ça me permet de me dire que je suis toujours en travail. » 

 

Le (non) jeu. 

« Si on me connaît, on dirait plutôt, comme ça, que je suis un Arlequin : italien avec un rythme effréné. Les films sont des challenges intéressants car je me demande si je peux fonctionner dans un non-jeu alors que malgré tout, je suis en train de jouer. Il y avait déjà cet aspect sur Rendez-vous [de Damien Chemin], ce qui m'a bien préparé pour le film d’après, Ordinary Man où je travaillais vraiment à contre-rythme. Moi, j’aime beaucoup ce qui est décalé, mais qu’on n’appuie pas et qu’on ne surjoue pas. C'est intéressant de se demander si on est capable de jouer un maximum de choses différentes. C’est pour le fun qu’on le fait aussi; sûrement pas pour l'argent (rires)! »

Passion vs réalité
« Il y a une envie de jouer et d'être dans des projets; un bon acteur n'existe que s'il a des projets. Mais dans un monde dans lequel il y a de moins en moins d'argent pour la culture, les gens qui ont des projets sont déjà bien contents d'en avoir. Après, à partir du moment où on a une famille, on se demande dans quelle mesure ce n’est pas un métier bénévole ou d'étudiant.  Mais moi, je me souviens de cette phrase : “il n'y a pas de petits rôles, il n'y a que des petits comédiens”.
Donc, quelque part, il faut fonctionner sur la passion et ne pas se dire : “j'ai fait des longs, maintenant je ne peux plus faire de courts métrages”. Et puis, on peut se dire que ces personnes-là vont peut-être faire d’autres films et qu’on pourra peut-être encore travailler avec eux...» 

Le court dans le parcours 

« On pourrait imaginer que les gens vous engagent parce que vous avez fait des longs métrages. Renaud Callebaut m’a demandé de faire un court avec lui. Il a vu Rendez-vous et Le Généraliste, et il a bien aimé ce que j’y avais fait. Donc, c’est chouette : ça veut dire que les courts métrages existent et circulent. C’est un métier dans lequel on doit constamment reprouver ce qu'on est capable de faire alors, peut-être qu’à chaque fois qu’on nous voit, on est dans la course et ça nous fait rebondir. »

 

Merry X-Mas.
« À Noël, autour d’une table, une famille envoie des trucs assez durs les uns sur les autres sans que jamais personne ne relève quoi que ce soit. Ce qui me plaît vraiment dans le prochain Callebaut, c’est qu’au-delà du fait qu’il est vraiment bien écrit et que j’ai adoré l’univers de KWIZ, il est un peu théâtral mais en même temps, très cinématographique. Ces personnages sont omniprésents. Donc, on n’est pas dans un film de ligne, occupé à faire des répliques et des champs/contre-champs. Et évidemment, il y a l’idée du non-jeu et de la subtilité. Super ! »

 

La Monique de Joseph

« Damien avait envie de faire un moyen métrage à partir du Généraliste [un matin, Richard va voir son médecin parce que de beaux bois de cerf ont poussé sur sa tête. Monique, son épouse, est inquiète : son mammifère de mari, outre avoir délaissé le dîner de la veille, gigote allègrement dans tous les sens ! Non, vraiment, il ne peut pas sortir comme ça ! Qu’elle se rassure : le généraliste connaît son métier…]. C’est un peu la même situation, mais de façon plus développée. Avec un petit changement : c’est ma femme dans Le Généraliste -ma vraie femme, Véra Van Dooren – qui aura une tête de biche. Plus de cornes de cerfs pour moi ! » 

Vécu 2 : ALDI

« Quand j’étais avec Vincent, on faisait beaucoup de festivals pour montrer les films. À partir du moment où on est reçu dans des palaces et que tout est au doigt et à l’œil, c’est comme si, tout d’un coup, c’était normal que la vie soit comme ça. On n’a pas d’argent à dépenser, on n’est plus au courant que la vie réelle est très dure et que si les ALDI n’existaient pas, je ne sais pas trop comment les comédiens feraient! »

 

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