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35ème Festival du Court Métrage de Clermont-Ferrand

Publié le 15/03/2013 par Thierry Zamparutti / Catégorie: Critique

Au moment où la candidature de la Chaîne des Puys et sa faille de Limagne - un trésor naturel inestimable – cherche des soutiens de toutes parts pour figurer sur la Liste du patrimoine mondial de l’UNESCO, le Festival auvergnat de Clermont-Ferrand renouvelait son offre de plus de 400 films en programmation régulière et de plus de 7700 films au Marché. Il a clôturé le 9 février avec un nouveau record de fréquentation battu au-delà des 150.000 entrées.

illustration de Gwendoline ClossaisPar la même occasion, la page du 35mm semble irrémédiablement tournée puisque seulement 5% de l’ensemble des films reçus présentait ce format. Le numérique s’impose donc, mais sans réel standard et il faut reconnaître que le Festival a eu techniquement fort à faire en jonglant avec les différentes propositions en provenance des producteurs et réalisateurs de quelque 123 pays d’autant plus que la plupart des salles n’étaient pas encore équipées en DCP.

Le format numérique a contribué à permettre aux auteurs de garder une grande liberté pour s’exprimer au-delà de la problématique des moyens financiers.  Même en Belgique, force est de constater que si on voit peu notre production sur les écrans nationaux, ce ne sont pas moins de 161 films qui furent inscrits, dont 5 furent sélectionnés en compétition et 6 dans des sections parallèles.

Tous ne sont évidemment pas soutenus directement ou indirectement par le Centre du Cinéma ou le Vlaams Audiovisueel Fonds, notamment via les écoles ou les ateliers de production. Et avec des auto-productions indépendantes et celles de particuliers, on peut constater que n’est pas réalisateur qui veut. Il faut des dispositions évidentes afin de réussir à raconter une histoire qui se tient en peu de temps dans un espace visuel et sonore personnel et cohérent. À titre de comparaison, l’Allemagne obtient le même nombre de films sélectionnés pour 417 courts envoyés et la France tient le haut du panier avec 1585 films et 85 sélections.
Côté belge, nous avons trouvé en compétition internationale : le très sensible Sidewalk de Berivan Binevsa où un homme sans papier attend le retour de sa femme dans la cave qui leur sert d’appartement et de laquelle il voit la vie s’écouler à hauteur de jambes; le déjanté Perfect Drug du flamand Toon Aerts, une descente infernale et parfois très glauque dans l’univers des substances à éviter (vraiment !) ; en compétition française en raison de la coproduction avec nos voisins : l’étrange et abstrait Deux Iles, une réalisation collective produite chez nous par la Haute Ecole Albert Jacquard, Nieuwpoort en juin de Geoffrey Couanon, une coproduction Monkey où un adolescent handicapé au visage cherche à pénétrer le monde particulier de son grand-père qu’il rencontre pour la première fois, Braise de Hugo Frassetto coproduit par Arnaud Demuynck raconte un méli-mélo de rumeurs autour d’un couple qui se forme durant une soirée arrosée. Concourant dans ces deux compétitions Living Still Life/La Résurrection des Natures Mortes de Bertrand Mandico réunit l’Allemagne, la France et nos belges de la Parti autour d’une histoire de cadavres d’animaux mis en scène par une photographe qui leur redonne une vie image par image.
Lors de l’Euro Connection, la plaque tournante de la coproduction européenne de courts métrages, se déroulant en deux journées de pitches et de rencontres, la société bruxelloise Hélicotronc présenta ses activités et Eric Ledune eu l’honneur de pitcher son projet Pornography. C’est un film d’animation documentaire de 25 minutes au sujet d’une certaine morale, d’une certaine censure, d’une certaine injustice face au sexe alors que nous sommes tellement soumis à une violence quotidienne. De nombreux contacts furent noués et il signa une coproduction avec Lardux Films.
Au palmarès, nous trouvons indirectement un belge, le comédien Fabrizio Rongione. Le film où il tient l’un des deux rôles principaux s’est vu honoré du Prix Spécial du Jury de la 35ème compétition française. Le sens de l’orientation de Fabien Gorgeart raconte avec beaucoup de sensibilité comment un repérage tourne en un huis clos entre deux amis se confiant leurs doutes et leurs certitudes face à leurs histoires d’amour et à l’envie ou non de paternité. (voir illustration)
Pour le palmarès complet www.clermont-filmfest.com.
Pour en revenir à La Haute Ecole Albert Jacquard de Namur, elle a créé la surprise en ayant à son compte une sélection en compétition pour la deuxième année consécutive. Joël Jacob, coordinateur en animation et illustration numérique 2D, et nouveau prétendant à la direction technique de l’établissement nous a apporté quelques éléments de réponse.
La section infographie fut créée en 2000 et la formation en animation 2D est entrée dans sa quatrième année. Toute la réflexion de l’équipe pédagogique se sert de l’expérience plus ancienne de la section infographie et de l’apport de professeurs extérieurs qui couvrent un tiers de la charge horaire de l’institution. La qualité de ces professionnels qui apportent leur expertise tant au niveau de la théorie que de la pratique est fondamentale. Ils participent activement à un enseignement de haut niveau. Notons que parmi eux Serge Umé, Vincent Tavier, Vincent Patar et Stéphane Aubier ont participé avec succès au long métrage d’animation césarisé Ernest et Célestine !
Le film sélectionné en 2012, Mal de mère d’Alexia Cooper, faisait partie des premiers films de fin d’études achevant le premier cycle de trois années de formation. Sa sélection donna à l’école du crédit supplémentaire pour participer aux différentes coproductions Canal+, Cargo Films, La Fabrique d’Image… Avec Deux Iles, c’est la cerise sur le gâteau. Coproduit en France par la boîte de Beineix Cargo Films et Canal +, ce premier film se voit en plus distribué par Autour de Minuit la très réputée structure de production/distribution de Nicolas Schmerkin.
Ce n’est naturellement pas un hasard au vu des deux prix que le film vient d’obtenir à ANIMA : le Prix du Meilleur film étudiant et le Grand Prix de la Fédération Wallonie Bruxelles. Pourvu que cela dure !

 

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