BXXL, une série de Robin Conrad et Lenny Grossman

Pendant quelques mois, les réalisateurs Robin Conrad et Lenny Grossman, habitués de la scène rap bruxelloise, ont suivi ces créateurs dans leur pérégrination. Avec ce qu’il faut de distance, ce qu’il faut d’effacement pour laisser au spectateur la possibilité de ressentir les émotions derrière les masques des artistes. Même si on sent la complicité qu’ils ont réussi à établir avec leurs protagonistes, nécessaire pour qu’ils se confient de la sorte face caméra, cette plongée dans l’intimité se ressent, particulièrement dans les parcours de Smahlo et Blu Samu, tous deux humbles et sincères lorsqu’ils se racontent. Derrière la façade d’un métier souvent idéalisé, l’on découvre des personnalités diverses, et des combats individuels très différents. De Blu Samu, qui questionne sans cesse son identité et son usage de la langue, à Geeeko le poète qui souhaite marcher hors des sentiers déjà battus par ses pairs, en passant par Roméo Elvis, toujours en apprentissage malgré son statut de célébrité déjà acquis. Chacun avec leurs expériences et leurs enjeux, ces rappeurs montrent la diversité d’un univers méconnu ou romancé. Un récit choral, traversé d’ellipses mais aussi de moments de stase, le temps d’une résidence d’écriture, ou d’une parenthèse à l’abri des projecteurs.

Et tout le temps, toujours, on sent l’énergie qui les habite, malgré les moments de découragement et les revers. En studio, on se prend la voix puissante de Smahlo, les textes riches de Blu Samu, les beats de Geeeko ou les tirades de Roméo Elvis. Sur scène, quand ils en ont l’occasion, on se nourrit des vibes qui se déchaînent, emmagasinées pendant des semaines et des mois d’inaction, de confinement forcé et d’écartement de leur public. Pour ces musiciens qui vivent au rythme des concerts et des festivals, la période a été tout aussi difficile. Voire plus, sans contact avec leur public pour qui ils respirent normalement au quotidien. Et derrière l’image reluisante d’Instagram et des réseaux sociaux travaillés, on penètre avec les cinéastes dans l’intimité et le quotidien de cette femme et de ces hommes fragiles, comme tout artiste.

En à peine deux heures, BXXL prend son spectateur par l’épaule et l’emmène dans les aventures de ces poètes des temps modernes. À force de textes, de plans et d’images fortes, nous vivons avec eux un moment d’exception, intime et humain à la fois. Des nuits du Botanique au concert du 21 juillet - avec une apparition de Zwangere Guy - en passant par les concerts improvisés sur le Mont des Arts, prenez le temps de vibrez avec ces beats. Vous en ressortirez avec de beaux sons dans les oreilles, et des images plein les yeux.

Auvio