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Cheers de Angela Al Souliman

Publié le 24/01/2020 par Bertrand Gevart / Catégorie: Critique

Dans ce court métrage de fiction, la réalisatrice et actrice Angela Al Souliman questionne avec une intelligente simplicité les relations entretenues par des personnes de cultures et d’origines différentes. Sélectionné pour la 12ème édition du Festival Elles Tournent, le court métrage propose une réflexion sur les rapports amoureux d’une femme exilée face à la négation de son être.

Cheers de Angela Al Souliman

Pensé en une seule séquence, le court métrage s’ouvre en noir et blanc sur un couple. La bouteille de vin n’est plus un prétexte de partage, mais un moyen pour faire émerger quelque chose d’enfui, les frustrations, les déconsidérations, la négation, comme si elle, Angela, n’avait jamais eu d’espace pour dire, pour faire, pour exister.

La caméra se resserre rapidement sur elle. Au choix immoral et paternaliste du partenaire masculin s’oppose un choix esthétique et radical fort de mise en scène de la réalisatrice, qui relègue l’homme au hors champ, dont la voix résonne comme autant d’insultes, de provocations. Chaque mot est une épine de trop marquant l’impossibilité, cette fois-ci, de ne rien dire, de baisser la tête.

La réalisatrice amène le conflit et la puissance de son récit par le dialogue, reposant lui-même sur un passé douloureux de la protagoniste. Lorsque la fausse sollicitude flirte avec le paternalisme, lorsqu’une question se transforme en reproche quotidien, la réalisatrice parvient à mettre en place une critique contemporaine des rapports de domination hommes-femmes. Finalement, ce dialogue est un non dialogue, celui de la dissonance, de la non considération de l’autre. C’est un dialogue dans lequel l’échange est un non-lieu. Le « je veux ton bien, je veux t’aider » n’est qu’un pas pour mieux contrôler l’autre, pour mieux coloniser l’autre.

Ce qui rend ce film si singulier, c’est la puissance du hors champ, du passé contenu dans les mots, dans les gestes d’Angela, une femme qui se bat et qui, comme une première fois, dit non.

 

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