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Crisis de Nicholas Jarecki

Publié le 27/09/2021 par Grégory Cavinato / Catégorie: Sortie DVD

Montréal Parano

Tout commence lorsque Cédric (Charles Champagne), un jeune dealer, est arrêté à la frontière entre le Canada et les États-Unis en possession de centaines de pilules illégales de fentanyl, au terme d’une chasse à l’homme par les forces de l’ordre. Mais le jeune homme n’est qu’un pion dans un trafic à grande échelle qui s’opère des deux côtés de la frontière, sous les ordres d’un dangereux mafieux québécois surnommé « Mother » (Guy Nadon). Cette arrestation va provoquer une réaction en chaîne et bouleverser l’existence des trois personnages principaux.

Crisis de Nicholas Jarecki<br />

 

- Claire Reimann (Evangeline Lilly) est une architecte qui se bat depuis des années contre une dépendance à l'Oxycodone. Lorsque son fils adolescent, ami de Cédric, est retrouvé mort d’une apparente overdose, elle se lance dans une mission-suicide pour découvrir les véritables liens entre son fils et les narcotraficants… 

 

- Jake Kelly (Armie Hammer) est un policier aux méthodes musclées qui a réussi à gagner la confiance de « Mother » en se faisant passer pour un dealer concurrent et en infiltrant les rangs de l’organisation criminelle. Alors qu’il dirige une opération d’envergure pour éliminer le réseau de Montréal, sous la supervision du lieutenant Garrett (Michelle Rodriguez), Jake apprend que sa sœur adolescente (Lily-Rose Depp), junkie notoire, a replongé... 

 

- Enfin, le Dr. Tyrone Brower (Gary Oldman, également producteur) est un professeur d'université employé par une grande entreprise pharmaceutique pour tester et surveiller le lancement d'un nouvel antalgique non addictif, le Klaralon. Mais lorsque les tests révèlent que le produit est en fait trois fois plus addictif que la moyenne, personne ne veut le croire (ou préfère l’ignorer), y compris le doyen de la faculté (Greg Kinnear), qui, par ailleurs, est son plus vieil ami. Anticipant sa réaction, les pontes de l’entreprise pharmaceutique (Luke Evans et Veronica Ferres), veillant avant tout aux portefeuilles de leurs actionnaires, prennent les devants et s’emploient à discréditer le professeur en ressortant de vieilles accusations de harcèlement sexuel. Acculé, mais refusant catégoriquement d’approuver pour la vente un produit qu’il sait être terriblement nocif, Tyrone n’a pas d’autre choix que de devenir un lanceur d’alerte, au risque de tout perdre. 

 

C’est sur le modèle de Traffic, de Steven Soderbergh, grand film choral sur les méfaits de la drogue, que Nicholas Jarecki (qui signe son second long métrage de fiction, neuf ans après l’excellent Arbitrage) construit son intrigue et développe ses thématiques. Si, à première vue, Crisis peut être vu comme un simple « Traffic 2 », cette fois, la crise des opioïdes est examinée sous l’angle de personnages secondaires, le projet consistant à démontrer que l’addiction et la drogue (sous ses différentes formes) n’affectent pas uniquement l’existence des consommateurs et des victimes, mais également celle de leur entourage et de la société au sens large. 

 

Pour ce faire, le réalisateur imagine un thriller efficace, plutôt balisé (flics infiltrés, mafieux psychopathes, fusillades) qui, certes, ne brille pas par son originalité, mais qui est interprété avec conviction par trois acteurs très impliqués : intense, Armie Hammer (dont les problèmes judiciaires actuels ont privé le film d’une sortie plus médiatisée) incarne un ours mal léché qui perd son humanité au fur et à mesure de son enquête ; Evangeline Lilly remise le glamour au placard dans le rôle d’une mère éplorée déterminée à en finir avec la vie ; tandis que Gary Oldman, tout en dignité, est l’âme du film : un personnage fragile, mais intègre et courageux qui, tel James Stewart chez Frank Capra, fera tout pour faire éclater la vérité, quel que soit le prix à payer. 

 

Questionné sur la crise des opioïdes et les pratiques illicites de certaines grandes compagnies pharmaceutiques, le personnage incarné par Oldman demande à un journaliste : «Pourquoi n’en parlez-vous pas tous les jours ?» En effet, si le Klaralon du film est une drogue fictive, chaque année, de nouvelles opioïdes apparaissent sur le marché et font l’objet d’un trafic fructueux. Les overdoses aux opioïdes font plus de 100 000 victimes par an, un chiffre qui augmente de 20% chaque année. Plus d’américains en sont morts au cours des deux dernières années que durant la guerre du Vietnam. Si en tant que polar noyé dans la masse des sorties dvd, Crisis ne révolutionne rien, son message, lui, mérite d’être entendu et rappelé plus souvent !

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