Sur une mer d’huile, deux êtres humains dans leur plus simple appareil dérivent sur une barque de fortune. Aurora et Jeremy survivront-ils à cette épreuve, et qu’adviendra-t-il de leur relation s' ils y parviennent? Se jouant des corps de ses protagonistes autant que des attentes des spectateurs, Levi Stoops livre un court métrage tantôt tendre, tantôt sanglant sur les remous de l’amour et de l’existence.
Drijf de Levi Stoops
Parfois, il suffit d’une amputation pour ressouder un couple. Et ce n’est pas la seule ironie que nous sert le cinéaste, récompensé pour ce film du prix du Jury au festival International du film d’animation d’Annecy. Aurora et Jeremy sont certes perdus au milieu d’un océan gigantesque et apparemment sans issue, ils n’en restent pas moins des humains pleins de défauts, de tics et de tocs. Nus comme des vers, l’un comme l’autre n’hésite pas à se changer les idées avec une petite séance de plaisir solitaire, nourrie de fantasmes plus ou moins aquatiques. On se change les idées comme on peut, lorsqu’on est coincé sur un bout de bois au milieu du néant.
Avec ses deux pantins dessinés, Levi Stoops s’amuse et se joue des échelles, nous donnant tour à tour à voir de magnifiques gros plans purulents et des paysages infinis. Animé avec précision et humour, Drijf est un bijou qui, sous ses apparences glauques et malaisantes, laisse entrevoir ce qu’est la condition humaine dans toute sa complexité. Une existence tissée d’instincts de survie, de violence, d’individualisme, mais aussi d’amour et de sacrifice de soi. Optimiste? Plus qu’il n’y paraît, sans pour autant se départir d’un cynisme mordant que l’on connaît si bien chez nos voisins du Nord.