Nous avons rencontré Benivsa Berivan au Botanique, un samedi de décembre. Son premier court métrage de fiction, La Mélodie du Petit Château, venait d'être présenté hors compétition au Festival du Cinéma Méditerranéen : "Participer au Méditerranéen, c'est vraiment pour le plaisir d'y être, de voir mon film projeté, de faire des rencontres." nous raconte Berivan - tout le monde l'appelle comme ça - qui est arrivé en Belgique il y a 7 ans. La passion pour le cinéma existait déjà auparavant : "je croyais que le cinéma serait la meilleure façon de m'exprimer" et c'est à l'INRACI qu'elle a l'opportunité de développer cette passion. "C'était là-bas que j'ai appris la langue et que j'ai connu des Belges. En fait, l'INRACI était mon intégration en Belgique."
Entrevue avec Benivsa Berivan
Malgré cette intégration réussie, Berivan n'a pas oublié ses racines kurdes. Pour son film de fin d'études, elle a choisi de parler des difficultés qu'une réfugiée politique kurde doit affronter pour avoir sa situation régularisée en Belgique. "Ziné a eu un parcours assez compliqué. En Belgique, elle doit raconter son histoire afin d'avoir des papiers, pour exister en tant que réfugiée politique. Je voulais parler de ce système-là, je voulais montrer que parfois il n'est pas efficace." Tourné partiellement au Petit Château, le centre d'accueil des réfugiés à Bruxelles, le film se veut le plus proche possible du réalisme. "Moi, en tant que réfugiée politique, je n'ai jamais vécu là-bas. Mais je connais bien l'endroit. Les gens qui y travaillent essayent de faire de leur mieux, mais la réalité dedans est très difficile. Moi et l'équipe de tournage, nous avons passé quatre jours là-bas." Une volonté de réalité qu'on retrouve aussi dans le casting.
Tous les acteurs étaient des Kurdes qui habitent à Bruxelles, "sauf la protagoniste qui est une Euro Kurde qui habite en Allemagne et l'acteur qui joue l'interprète qui vient de France." Berivan souligne qu'elle a mis des choses d'elle dans ce personnage, "mais ce n'est pas moi!" Ziné est coincée dans un monde où les mauvais souvenirs se mélangent avec l'incompréhension généralisée. "Ce n'est pas évident pour une femme qui a été violée et déshonorée d'accepter ça. Elle n'arrive pas à le dire devant le fonctionnaire du bureau des réfugiés, mais elle ne le dit pas dans sa communauté non plus. Pour les Kurdes, une femme violée est une femme déshonorée. Elle dit : Ils ont fait de moi un péché. Quelque part dans sa tête elle pense qu'elle est salie. Elle ne se sent pas capable de partager cette expérience ni avec sa communauté ni avec les Belges."
La Mélodie du Petit Château a eu une Première réussie à Media 10-10 : "On ne s'attendait pas à gagner le prix de la meilleure première œuvre avec mon film de fin d'études. C'est une reconnaissance qui me donne du courage pour demain."
Vitor Pinto