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Even Lovers get the Blues de Laurent Micheli

Publié le 01/09/2017 par David Hainaut / Catégorie: Critique

La valse des trentenaires

 

Étonnant lauréat du Prix de la Critique l'an dernier du Festival International du Film Francophone de Namur - en compétition nationale -, Even Lovers Get The Blues ("Même les amants ont le blues"), premier long-métrage de Laurent Micheli, a connu un destin particulier, voire miraculeux. Jusqu'à sa sortie nationale, ce 30 août.

Even lovers get the bluesÉté 2014. Plusieurs médias relatent l'appel d'un jeune réalisateur sorti de l'INSAS, Laurent Micheli, dont le ciel vient de s'abattre sur la tête. Autour des Lacs de L'Eau d'Heure en effet, on vient de lui dérober la matière filmée d'une semaine entière de son premier film, issu d'un financement participatif. Malgré la récompense financière promise, son cri restera vain, et tout sera à refaire. Il faudra patienter jusqu’en 2016 et la sélection nationale du FIFF de Namur en septembre, pour saisir qu'il s'agissait bien du même film qui concourrait auprès des derniers Dardenne, Marion Hänsel et autre Stephan Streker, notamment. La mésaventure des débuts se transformait en fait en une pré-promo... involontaire!
Mieux: lors de l'événement, nos confrères-critiques lui attribuent leur Prix, comblant de joie une équipe qui voyait là son improbable périple récompensé. Trois mois plus tard, s'ensuit une avant-première bruxelloise survoltée lors du BE Film Festival, dans un Bozar plein à craquer. Et enfin, une cascade de sélections et de récompenses du monde entier, toujours en cours, d'Australie à Israël, en passant entre autres, par l'Espagne, les États-Unis, la France ou le Royaume-Uni. Un conte de fée semble né.
Venons-en au fait : sorte de photographie de son époque, cette chronique amoureuse retrace le portrait d'une bande de jeunes trentenaires désabusés, passionnés et en quête de liberté. Après un drame commun, leur quotidien, entre espérances, inquiétudes et névroses, se retrouve complètement chamboulé. Égarés dans leurs sentiments, dans une société en perte de repères, ils se laissent alors aller à leurs libertés. Pour justifier et aller au bout de son propos, Micheli livre une vision assez authentique de sa réalité : cela donne quelques scènes assez... explicites, à ne pas mettre devant les paires d'yeux les plus fragiles. Bien qu'au final, tout cela soit dérisoire, face à ce qui est aujourd'hui disponible à grande échelle sur Internet, pour tout un chacun...
C'est bien la révélation du talent de réalisateur de Laurent Micheli qui compense le peu de moyens annoncé sur papier, donc. Profitant de sa carrière théâtrale, ce Bruxellois a su en outre constituer et préparer en amont une troupe parfaitement huilée : de quoi permettre une performance collective de haut vol, d'acteurs pour la plupart méconnus du grand public, en phase avec une équipe technique tout aussi bien pensée. Le rythme bien dosé du film nous gratifie de plusieurs scènes mémorables, sans parler d'une bande-originale particulièrement aboutie. C'est qu'à travers la personnalité sensible de cet auteur-réalisateur de 35 ans et le subtil maniement de sa caméra, chacun avait sans doute pressenti la singularité, le potentiel et le parfum de cette jolie ode à la liberté, à l'instar de partenaires financiers, arrivés plus tard sur le projet. Fort à présent de cette carte de visite, Micheli, qui a eu l'intelligence de parfaire sa formation par un diplôme à la prestigieuse école de la Fémis en France, a d'ores et déjà de nouveaux soutiens nécessaires, pour mieux s'atteler à la préparation de son deuxième long-métrage, Lola vers la Mer. Ce n'est là que justifié.

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