Exposition & rétrospective Pier Paolo Pasolini, Cinematek, jusqu’au 18 avril 2022

Pas tout-à-fait chronologiquement, la rétrospective avance au fil des films clés et charnières (s’ils ne le sont pas presque tous tant l’oeuvre de Pasolini est forte et dense, condensée quinze ans de production, de 1960 à sa mort en 1975). Mais les films alternent de sorte que l’oeuvre peut se saisir dans son ensemble depuis les premiers films, Accatone et de Mama Roma jusqu’au délire visuel du Décaméron, au brulôt politique qu’est Salo, en passant par le Carnet de notes pour une orestie africaine, magnifique documentaire du Pasolini voyageur, en Afrique cette fois-ci. Quelques films dont Pasolini a signé le scénario comme ceux de Fellini ou Rossi, avant qu’il ne s’empare de la caméra, ou d’autres plus tardifs comme Ostia ou Histoires scélérates de Sergio Citti, sont aussi au programme ainsi que le documentaire de Marco Tullio Giordana autour de l’assassinat du poète et la fiction d’Abel Ferrara qui revient sur la dernière journée d’un Pasolini incarné par William Dafoe.

En 1965, Pasolini tourne Comizi d’amore, une enquête sur la vie sexuelle des Italiens qui prend la forme d’un voyage dans son pays. Photographe et vidéaste, Chantal Vey est parti sur les traces du cinéaste. Elle a repris l’itinéraire qu’il a emprunté dans son film et décrit plus tard dans un écrit, La Longue route de sable. Elle en est revenue avec des films, des photographies, un livre et cette exposition : Contro-corrente, Sur la route de Pier Paolo Pasolini installée dans le hall d’accueil de Cinematek. L’artiste française y organise une sorte de déambulation entre photographies et films, images statiques et animées. Avec ces impression de portraits du cinéaste, presque effacées telles des traces de présences accumulées, les défilés de ses photographies sur des écrans placés en hauteur, les projections sur trois autres écrans des lieux visités lors de ce voyage qui viennent dialoguer entre eux, Chantal Vey crée une sorte d’errance, de dialogue rêveur avec le parcours de l’artiste, qui, dans ses traces, fait surgir sa présence fantomatique. Un documentaire passionnant extrait des archives de l’INA est mis à disposition qui nous fait entrer dans une approche plus didactique du cinéaste italien.

C’est que l’exposition de Chantal Vey, elle, se passe de toutes explications ou propos plus pédagogiques sur la démarche de l’artiste qu’elle nous fait un peu rêver. Le corps voyage entre les écrans, quand la tête se lève vers les images de Pasolini, descend vers les vitrines regarder quelques gros plans mis en avant, s’immerge dans les images de la mer et le souffle des vagues. Travaillant elle-même sur le voyage et la marche, elle nous invite à une déambulation rêveuse où les lieux partagés font lien, et la rencontre se fait plus intime.

Le livre de Chantal Vey est en vente à l'accueil et sur cette adresse internet

Toute la rétrospective de Pasolini ici : https://cinematek.be/fr/programma/pier-paolo-pasolini