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Holgut de Liesbeth De Ceulaer

Publié le 05/10/2021 par Fred Arends / Catégorie: Critique

Les Terres froides

 

Ce très beau et singulier documentaire, nous convie à un voyage étrange et étonnant aux confins de la Sibérie, dans la toundra, terre de mythes et de légendes. La réalisatrice nous parle de quête, de transmission, de mystères, de permafrost et de la terre comme unique ancrage de l'humanité. Et surtout de mammouth, animal symbolique d'un temps révolu mais attisant toujours les imaginaires.

 
Holgut de Liesbeth De Ceulaer

Car tout commence par une légende. Celle du mammouth qui n'a pas pu être sauvé avec les autres animaux d'un grand déluge dans un mythe proche de l'Arche de Noé. Cette légende se raconte aujourd'hui et fonde l'aventure à laquelle nous sommes invité.e.s. Un père, son fils et un scientifique en sont les aventuriers à la fois déterminés et méticuleux, désabusés parfois.

 

La cinéaste filme ses trois personnages avec beaucoup de proximité et de douceur. La relation père-fils est particulièrement mise en évidence. Chasseur, le père initie son fils aux techniques de capture et de chasse mais aussi et surtout aux récits et aux histoires de leur terre, aux mythes fondateurs qui les poussent à chercher des ossements dans le permafrost, ces terres éternellement gelées et qui commencent à fondre aujourd'hui. Tout comme le renne sauvage qu'ils cherchent sans relâche, comme s'il avait disparu, à l'instar des autres animaux.

 

Ce motif de la disparition se fait de plus en plus fort au fur et à mesure de la quête et de la découverte des ossements. Liesbeth De Ceulaer propose alors une approche fascinante des paysages et de la nature. Surimpressions, images fantomatiques, puzzles d'ossements en transparence, tout semble faire lien entre présent/absent, présent/passé, infiniment grand et infiniment petit comme cette imposante image de paysage rocheux qui, par la grâce de la caméra, semble devenir l'empreinte fossilisée d'une créature géante à jamais disparue. Le montage sonore entrelace les dialogues quotidiens entre les trois personnages, les différentes voix-off qui scandent les grands mythes et légendes, et nappe certains paysages d'un souffle étrange, notamment dans de magnifiques inserts de nature. Le mammouth participe à ce passage entre passé et présent : celui d'hier, figé dans le permafrost et celui d'aujourd'hui, découvert sur l'île de Liakhov en Nouvelle-Sibérie, surnommée l'île aux mammouths, et envoyé à Séoul pour un clonage incertain. Le film devient alors une sorte de documentaire de science-fiction minimaliste qui, par le truchement d'éclats de pierre, nous emporte dans les étoiles.

 

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