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Marée haute de Noha Choukrallah

Publié le 14/09/2023 par Basile Pernet / Catégorie: Critique

Marée haute retrace le chemin d’une jeune femme, Hannah, mère d’une fille et divorcée d’un mari dont elle veut l’éloigner. Noha Choukrallah centre l’attention sur une journée de leur vie à tous les trois, le long des vastes plages de la côte belge, délestées de ses baigneurs saisonniers, mais parcourues d’un vent pénétrant. Tandis qu’elle se doit de respecter la garde alternée de sa fille, Hannah semble faire face, de façon souvent impulsive, à l’influence d’un homme dont elle ne veut plus dans sa vie, d’autant moins dans celle de sa fille.

Marée haute de Noha Choukrallah

C’est d’une main très fine que Noha Choukrallah déroule le récit de cette femme qui décide de prendre le contrôle de sa vie, et d’agir en faveur de ce qu’elle croit le mieux pour sa fille. Son action est par ailleurs teintée des ressentiments contre lesquels elle semble finalement se battre en priorité. Mais l’adresse narrative réside en la façon de centrer l’attention sur le drame avant d’en déterminer les motifs. Non qu’ils soient superflus, mais il semble que l’intérêt est de nous montrer les détails et les instants de cet itinéraire conflictuel. Les questions peuvent dès lors se passer de réponses puisque l’éclat des regards dévoile un monde d’impressions et de passions très vives.
Un récit qui se situe donc proche de l’intimité, que celle-ci est engloutie ou au contraire rassurée par l’immensité du paysage et l’horizon infini de la mer. Quelques heurts incisifs viennent troubler cette harmonie grise et silencieuse, dont le dernier initié par Hannah est de retourner en Angleterre auprès de sa mère, et d’en faire un refuge pour sa fille.
Peut-elle néanmoins compter sur la coopération de cette dernière, voire sur l’action de sa propre volonté, ou simplement sur un enchaînement favorable du hasard ?
Car la vie réelle comprend sa large part d’aléatoire, d’involontaire, et c’est à cette réalité que nous convie la réalisatrice.
Le décor est épuré, le son retient une certaine chaleur – en particulier dans les scènes représentant Hannah et sa jeune fille –, qui accentue le sentiment de proximité que l’on a avec cette femme rongée par la contrariété. L’attitude qu’elle a, lorsque sa fille lâche sa main pour rejoindre son père, exprime en quelques secondes la gravité des déchirements les plus profonds.
Terminons donc par saluer la saisissante interprétation de Bérangère Mc Neese, aux commandes d’une héroïne à la fois perdue et effrénée, décidée à parer tous les coups de l’injustice, et même la marée montante s’il le fallait, au risque de suffoquer, mais tenant sa fille à bout de bras.

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