À partir des travaux d’Arthur Keller, notamment sur les questions de résilience climatique et de décroissance économique, Rino Noviello propose un nouveau documentaire dans lequel il donne la parole à différents partisans d’initiatives locales et citoyennes. Judicieusement intitulé Moins & Mieux, ce film sonne comme un message d’alerte sur l’état actuel de nos sociétés qui, sans reconstruction fondamentale et immédiate, continuerait de compromettre l’habitabilité de la planète.
Moins & Mieux de Rino Noviello
Moins & Mieux présente une structure qui alterne entre explications de concepts liés à la pensée dite de résilience et illustrations de sa mise en application par des militants. Ce faisant, Rino Noviello met en évidence l’idée que ces questions peuvent être comprises et adoptées par tout le monde en dehors des sphères intellectuelles et de l’ingénierie scientifique. C’est une pensée qui concerne tout le monde puisqu’elle s’applique à la protection de la planète et des modèles de vie sociale.
Ainsi plusieurs projets d’initiatives citoyennes ont vu le jour suite à une sensibilisation collective sur l’état de détresse du monde, au niveau de ses constructions sociales, économiques et politiques. Ces projets visent une réduction de l’impact de l’homme sur son environnement (notamment par les modes de productions et de consommation), de même que l’amélioration de l’hygiène de vie et des liens avec le vivant.
L’une des intervenants présente « Less béton », une initiative de débétonisation des pieds d’arbres en zones urbaines. Il s’agit bien de retirer le béton qui enchaîne les arbres pour le remplacer par une terre fertile qui accueille par la suite des plantes comestibles et des herbes aromatiques. S’il prend de l’ampleur, ce projet verra la création de potagers au cœur de la ville. L’une des ambitions est également de rassembler les citoyens pour détruire et reconstruire ensemble. L’on comprend que l’effort collectif, s’il vise une amélioration de la vie quotidienne en société, est un grand succès.
Puis, la caméra de Noviello part à la rencontre de Joffrey, de Florian et de Laura. Le premier est fondateur d’une scierie locale à petite échelle. Le bois provient des forêts voisines et est traité avec un maximum de matériel d’occasion et de récupération. Le deuxième crée un élevage de poules en plein air à partir d’un poulailler mobile. Les poules, dont le bien-être est le premier souci, évoluent à l’orée des forêts et les œufs sont directement livrés en vélo aux habitants du village. Enfin, Laura est partisane de l’activité manuelle à faible consommation, du recyclage et de l’entraide au sein des communautés. Elle favorise la solidarité et soutient un modèle de vie sobre et raisonné, au sein duquel le bien-être et la cohésion sociale priment avant tout.
Ces différents exemples sont porteurs d’espoir et d’optimisme ; ils montrent que le premier effort à faire pour sortir de la société de surconsommation et d’épuisement se trouve à échelle locale. En outre, tandis que certains encouragent à un démentiellement radical de notre modèle de vie social, économique et industriel, d’autres reconnaissent que leurs constructions au sens propre n’ont pu aboutir que grâce aux matériaux produits par l’industrie. De toute évidence, à travers les témoignages et explications des partisans de la résilience, c’est aussi l’interdépendance de modèles de vie distincts qui est questionnée.
Moins & Mieux est un documentaire infiniment actuel et d’un intérêt certain, qui soulève des questions fondamentales à mesure qu’il en résout. Rino Noviello s’applique dans une réalisation consciencieuse et poétique, proche de l’enquête de terrain. Amorcé par une note très grave, à savoir l’état alarmant de notre planète par la surexploitation de ses ressources énergétiques, le film met en lumière un sentiment de liberté et d’indépendance qui est à la fois le point d’origine et l’aboutissement des différentes initiatives qu’il présente.