C’est la fin du printemps dans le nord de l’Albanie et des ombres mémorables jonchent le sol. C’est le silence de la montagne, qui nous rappelle ces choses que l’on a perdu au jardin de la mémoire. Les voix se font échos d’un quotidien, la vie semble être ailleurs.
Mountain de Grégoire Verbeke
Publié le 20/03/2019 par Bertrand Gevart / Catégorie: Critique
Grégoire Verbeke, le réalisateur de Mountain éternise l’instant durant quatre jours de marches intensives pendant lesquels Prek Gjoni déménage son troupeau avec l'aide de Jovalin vers les pâturages en haute altitude. Peut-on marcher avec de vieilles godasses esquintées et un parapluie ? Il n’y a pas de cordonniers dans le coin, seulement le cri des animaux.
Aux plis de la lumière, les voix se répètent, les gestes suivent. Le berger accompagne son bétail avec brutalité, persévérance et amour, jusqu’à en faire saigner. Ils grimpent sans cesse dans l’immensité des espaces montagneux d’Albanie, comme s’ils recherchaient un endroit perdu, mais connu de tous, celui de la verdure apaisante. Les chèvres se dispersent et sont intimement reliées au paysage. Le film se donne à voir au fil de la marche, rythmée par les pas qui découvrent la nature dilatée. Grégoire Verbeke capture les images d’une beauté fragile, celle de la fatigue, de l’effort physique et le lien entre le vieux berger et ses animaux. Le réalisateur dresse le portrait d’un homme en prise avec la nature, celui d’un berger vivant encore au gré des saisons, se laissant aller au vagabondage et la migration nécessaire de ses bêtes. Un portrait poétique qui montre la dureté de ce périple sauvage.
