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Rencontre avec Mathieu Mortelmans sur le tournage de Bastaard

Publié le 28/09/2018 par David Hainaut et Tom Sohet / Catégorie: Tournage

Mortelmans, ce bel(ge) exemple

 

Moins d'un an après avoir figuré dans la shortlist des Oscars pour son court-métrage Complices, Mathieu Mortelmans vient, à trente-deux ans, de boucler le tournage de Bastaard (Bâtard), son premier long. Un réalisateur bruxellois prometteur, qui a la particularité d'orienter sa carrière des deux côtés de la frontière linguistique.

Dans le petit milieu du cinéma belge, le nom de Mathieu Mortelmans évoque déjà quelque chose. Et pour cause. Distingué dès son premier court-métrage (Chambre Double) en 2013, récompensé au Festival International Fantastique de Bruxelles et à celui de Palm Springs aux États-Unis, ce fils de père anversois francophone et de mère bruxelloise flamande a, depuis, confirmé ses aptitudes, en étant remarqué et chapeauté par le réalisateur flamand Jan Verheyen (Dossier K., Le Verdict...). Tant au Nord du pays donc, où il a réalisé pour le petit écran des séries (Familie, De Bunker, Gent-West, Vermist) et des docu-fictions (De Kroongetuigen), qu'en francophonie, via le court-métrage, lui qui a remis le couvert l'an dernier avec Complices, ce suspense d'une demi-heure primé lors du 20è Los Angeles Shorts Festival, autre lieu américain de prestige dans ce genre. Un sacre qui l'a qualifié pour la première liste des Oscars, où il figurait comme unique représentant belge.

 

« Quand on peut faire un film en un an, on fonce ! »

Tournage de Bastaard de Mathieu MotelmansAvec un tel tableau, logique que le jeune Mortelmans soit depuis sollicité de toute part. Ayant grandi à Anvers mais maîtrisant un français - sans accent - qu'il a parfait en étudiant à Louvain-la-Neuve (IAD), le réalisateur reste assez lucide pour prendre son temps. "Au cinéma, je préfère d'abord être séduit par un projet, qu'importe sa langue.", dit-il. Et s'il a poliment dû décliner des offres de réalisation pourtant alléchantes (dont des séries reconnues comme Ennemi Public ou Versailles), c'est parce que l'homme, depuis plus d'une bonne année, avait misé sur la préparation de Bastaard, premier aboutissement personnel dans le long-métrage, flamand celui-là. "J'ai été porté par une histoire qui me parle en particulier, et parce qu'il a été possible de construire ce film avec deux autres scénaristes. Grâce aussi, aux désirs d'un distributeur. Quand on débute et qu'on sait combien il faut se battre et prendre des risques pour réaliser un film, et qu'on a l'occasion d'en faire en un an au lieu de cinq, on fonce ! " C'est dans les derniers jours de ce tournage, long d'un gros mois, à Gand, que nous lui avons rendu visite, à la fin de l'été.

 
Des acteurs de renom, déjà

Pour une première œuvre, Bastaard a déjà de sérieux atouts sur papier. Coproduit par une jeune société (Marmelade) et un distributeur bien connu au nord du pays, Entertainment One, ce qui sera un thriller psychologique repose sur un casting de choix, avec des acteurs (re)connus dans le paysage flamand : Koen de Bouw (De Zaak Alzheimer, Loft, Het Vonnis...), Tine Reymer (Loft, The Premier...) ou encore, le jeune Spencer Bogaert (Labyrinthus, Vincent...). "C'est une chance de pouvoir compter sur de ces références, car pour moi le casting d'un film est crucial. Je fais difficilement de compromis à ce niveau", concède Mortelmans. "Nous avons d'ailleurs écrit le scénario en songeant à eux, et certains ont marqué leur accord avant même la lecture des dialogues. Comme Koen, alors qu'il tournait quatre mois à Los Angeles" (NDLR: dans The Last Tycoon, une série produite par Amazon, qui ne connaîtra qu'une saison). "Il y a en fait eu une confiance immédiate de chacun dans le scénario. Et quand les gens y croient dès l'écriture, tout devient plus simple pour activer le reste."

 

Tournage en Brabant wallon, Anvers, Namur et Gand

Bastaard de Mathieu MortelmansL'histoire, justement : annoncé comme un film sombre, elle suit le destin de Daan, 17 ans qui se remet du décès accidentel de son frère ainé, Robbie. Autour d'une mère enfermée chez elle et un père réfugié dans son travail pour faire face à ce deuil, il voit dans l'accueil d'un sans-abri au domicile familial l'occasion de combler le vide. "C'est quand ce gamin s'installe que tout se déclenche. On se demande si ce nouveau venu, sorte de frère-bâtard, porte un secret ou essaye de s'approcher de la mère. Voire si Daan est paranoïaque. Le film navigue entre ces pistes" . Tourné en grande partie à Grez-Doiceau dans le Brabant Wallon, le film s'est baladé de la région d'Anvers à Namur, passant par Gand ou Wavre. "Je reste Belge avant tout. Donc, quand je songe à des décors, qui sont capitaux pour l'ambiance que je veux créer, je visualise tout le pays. Puis, pour un producteur ou un technicien flamand, le Brabant Wallon n'est pas plus loin que la Mer du Nord! Des organes wallons de recherche comme le BATCH ou le CLAP nous ont en tout cas bien aidé."
Pas forcément conscient de l'atypisme de son profil, lui offrant de nombreux avantages par rapport à la plupart de ses collègues belges, Mortelmans ajoute: "C'est involontaire en effet, car j'ai toujours fonctionné ainsi. Mais ça me semble être une belle richesse. Puis, si le cinéma flamand est plus porté vers le genre ou le commercial et que francophone mise plutôt sur l'auteur, ce sont justement deux visions et deux styles que j'aime mélanger, avec l'envie d'aller vers un cinéma d'auteur qui vise le grand public. C'est capital que nos communautés collaborent. Cela peut sembler naïf, mais ça ouvre des portes vers plus de collaborations, de professionnalisme et de partage." 
Prévu sur les écrans à l'automne 2018, Bastaard a entamé sa longue phase de post-production.

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