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Te Inmerdo de Aurélien Ringelheim

Publié le 12/01/2007 par Grégory Cavinato / Catégorie: Critique

Jusqu'ici connu comme comédien (Regarde-moi, de Frédéric Sojcher, Nana d'Edouard Molinaro ), Aurélien Ringelheim nous revient en tant que réalisateur avec un court métrage de 30 minutes bien aidé par Jean-Paul Comart, acteur tournaisien ayant connu un certain succès en France (Scout Toujours… de Jugnot, Club de Rencontres de Michel Lang, Je Hais les Acteurs de Krawczyk, La Vie et Rien d’Autre et L627 de Tavernier, c’était lui !) et par une trame classique, mais plaisamment menée, bien décidé à rendre aux pessimistes et aux lâches un peu du bonheur qui leur est dû.

Cover Te InmerdoMr. Jean (Jean-Paul Comart) est un prof de latin, triste, seul et médiocre (un prof de latin quoi!), dont le moment le plus excitant de la journée est lorsqu'il se brosse les dents. Maniaque de l'ordre, de la discipline et de la propreté (sa brosse à dents doit impérativement tomber à gauche du verre et pas à droite, sous peine de faire s'écrouler tout son petit monde... ) ses journées, plus routinières que celles des agents de la STIB, arriveraient à déprimer le plus indécrottable des joyeux lurons. La seule photo qui traîne dans son appartement, est celle de sa vieille maman, c’est dire la fantaisie du bonhomme. 
Jusqu'ici, Te Inmerdo pourrait se comparer à Révolution (l'excellent film de Xavier Diskeuve ) dans sa description impitoyable de l'univers sordide d'un médiocre indécrottable pour qui désirs et ambitions sont de vieux souvenirs de jeunesse. Puis, comme dans toute histoire qui se respecte, arrive dans la vie de Mr. Jean une femme, qui va chambouler tout son petit monde hermétique et cloisonné. Cette femme, c’est Louise, sa jeune et pimpante femme de ménage, farfelue et un peu dérangée dans sa tête. Ejectée de son appartement et provisoirement à la rue, Mr. Jean est bien obligé de l’accueillir, comme jadis Jean-Pierre Bacri accueillit Emilie Dequenne dans Une Femme de Ménage de Claude Berri… D’abord pour quelques jours, puis quelques semaines… Pendant lesquelles Louise, la reine des pique-assiette commence à trouver Monsieur Jean à son goût et à réaménager l’appartement selon ses humeurs. L’imbécile aveugle, imperméable au charme de la jeune femme ne remarque que les changements et le bruit qu’une telle créature amène dans sa vie. Rendez-vous compte, elle s’est mise à le tutoyer ! Ça fait des années que personne n’avait fait ça...
C’est vrai que la Louise n’est pas non plus d’une discrétion exemplaire. Extrêmement bavarde et envahissante, la charmante tornade blanche franchit le seuil de la bienséance en invitant à dîner les voisins du dessus… Des voisins que Monsieur Jean n’avait jamais rencontrés. Mais comme Monsieur Jean est un peu faible et un peu lâche, il laisse faire… Oh, en se plaignant bien entendu ! Et surtout en se comportant de manière ignoble envers un couple de gogos pas beaucoup plus amusants que lui : Monsieur est comptable et aussi drôle qu'une phlébite, Madame, elle, est dans les assurances et a l’alcool triste.
Rêvant de quitter le boulet qu’elle traîne depuis quinze longues années, elle n’a pas dessaoulé depuis l’époque où les Bee Gees arboraient fièrement la carpette pectorale et les médaillons disco, poussant leurs cris stridents sous les boules à facettes. « Comment on dit « je t’emmerde » en latin ? » demande-t-elle à Mr. Jean, histoire d’entretenir un substitut de communication avec son mari… « Te inmerdo ! » Ce qui finalement tombe assez bien, c’est le titre du film !...  Louise, elle, pour mettre un peu de piquant dans cette soirée improvisée, décide de se faire passer pour la femme de Mr. Jean. Et ça Monsieur Jean, ça ne lui plaît pas ! Pensez donc ! C’est la première fois que quelqu’un l’appelle « mon chou » et désigne son appartement par un « chez nous » dévastateur qui le fait sortir de ses gonds. Prochaine étape, c’est décidé : il la vire !
Pourtant Mr. Jean, c’est pas le mauvais bougre. Se rendant compte de la goujaterie de ses paroles, le jour suivant, comme un petit garçon qui a fait une bêtise, il revient la queue entre les jambes avec des fleurs en guise d’excuses...

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