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Un invincible été, de Arnaud Dufeys

Publié le 05/03/2024 par Nastasja Caneve / Catégorie: Critique

Premier baiser échangé sur une plage en été, premier amour un beau jour qui vient vous emporter. Ça ne s'oublie pas quand c'est la première fois...
Les premiers frissons, les premières caresses, les premiers émois, le cœur qui bat, les yeux de chat, c'était ça les étés adolescents. On se croisait au bord de la piscine municipale, au karaoké du camping, sur le terrain de volley de la plage, ça flirtait, c'était gai. Ça, c'était avant. Quand Tinder/ Grindr n'existaient pas. Maintenant, on s'envoie des dick pic avant le pique-nique.

Un invincible été, de Arnaud Dufeys

Après des études à l'IAD, Arnaud Dufeys présente Un invincible été, son dernier court métrage à la Berlinale dans la catégorie Génération destinée aux jeunes de 14 ans et plus. Ce n'est pas la première fois que le jeune réalisateur et producteur liégeois touche de près à l'adolescence. Déjà dans son film de fin d'études, Atomes (2012), il racontait la relation conflictuelle entre un éducateur et un adolescent tempétueux. Dans Vertiges (2014), c'était Sophie Breyer qui incarnait une adolescente de 15 ans aux prises avec elle-même. Dans Un invincible été, c'est le jeune Clément, 16 ans, démangé par une curiosité sexuelle pas encore assouvie qui est au centre de l'intrigue. 

C'est l'été, Clément est seul dans la maison familiale, au bord de la piscine. Ses parents sont absents, l'ado s'ennuie... Le soleil, la chaleur le titillent. Il craque et rencarde un mec sur une application de rencontre. Il l'attend chez lui, lubrifiant en main. Gonflé à bloc. Écrit par Nicolas Moulin, le scénario est finement construit. On se dit que ça sent « le plan foireux », que Clément va passer un sale quart d'heure mais plan après plan, on se rend compte que Naël, l'invité surprise de 24 ans, est dans le fond, un chic type. 

Tourné en pellicule, il y a quelque chose d'assez brut et naturel dans la réalisation qui s'aligne parfaitement avec la relation qui naît entre les deux hommes. Arnaud Dufeys opte pour des arrêts sur image, comme des moments furtifs qui laissent entrevoir des sensations éphémères que le temps efface inéluctablement. Des frissons, des souffles, des hésitations, de l'excitation palpable dans l'image. Des souvenirs invincibles qui restent gravés à tout jamais et une attention au moment, favorisé par cette pellicule précieuse qui est comptée. 

Un invincible été, c'est aussi un film sur les corps, ceux des éphèbes, ceux des presque vieillards filmés avec délicatesse et pudeur et bercés par les compositions de Lolita Del Pino. L'eau, source de désir, berce les ébats qui se débattent. Le mot d'ordre, c'est la bienveillance. De Naël par rapport à Clément, de Clément par rapport à Victor, le voisin âgé dont il s'occupe avec attention. Arnaud Dufeys et Nicolas Moulin bousculent les idées reçues sur les rencontres 2.0. Certaines se passent mal mais dans la majorité des cas, c'est ok et c'est même plutôt bien.

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