En compétition au Festival International du Film de Mons dans la catégorie courts-métrages belges, Bertille Estramon était la seule étudiante parmi les cinéastes sélectionnés… Pourtant, ce film de fin d’études de l’IAD, libre et puissant, n’a pas laissé le public indifférent… ni indemne. Chienne a déjà reçu plusieurs sélections en festival, notamment en France à Clermont-Ferrand et Rennes et à Tampere, en Finlande.
Lucie est enfermée dans les toilettes. Sur ses mains, du sang. Sur son visage, une affreuse souffrance. Les mots sont inutiles pour comprendre ce qui s’est passé, Lucie est en train d’avorter seule, comme un animal blessé. Le halètement entendu au tout début du film qui semble celui de la chienne filmée dans la nuit est d’ailleurs repris par la respiration de souffrance de la jeune fille. Cette chienne-louve, comme un leitmotif, reviendra d’ailleurs tout au long du film. Lucie, elle-même est un animal blessé. Mais Lucie est aussi aux abois, une chasseuse et elle est prête à partir au combat pour retrouver celui qui, contre son gré, lui a fait subir cela. Pour bien se préparer, elle traverse une série de rituels : couper ses tresses, bander ses seins, se faire face dans le miroir. Car c’est avant tout un combat contre soi-même qu’il faudra mener, un combat contre le passé, contre la domination, contre la violence du patriarcat bien apprise et acceptée.
Inspiré du film d’Andrea Arnold, Red road, Chienne impose un geste cinématographique frontal et très courageux. Une jeune génération de cinéastes semble émerger pour raconter le corps des femmes sans fards. L’avortement, la fausse couche, le sang menstruel, sujets évincés jusqu’ici de toute l’histoire de l’art et du cinéma semblent enfin trouver leur place. Une libération déjà remarquée il y a peu, au Festival Millénium avec le très beau documentaire de Zoé Brichau Que no me roben los sueños qui montrait un avortement réel et le rituel mis en place pour le traverser.
