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Des Goyaves et des pommes

Publié le 03/08/2018 par Bertrand Gevart / Catégorie: Critique

Ce film collectif d’atelier n’est pas un réquisitoire contre la goyave ou un plaidoyer de l’utilité des pommes en temps de crise. Loin de moi l’idée de faire une salade de fruits, mais savez-vous où est Hélène ? Je ne parle pas d’Hélène de Troie ou d’Hélène Carrère d’Encausse, ni même d’Hélène Segara criant d’une vive voix son amour pour le travail quotidien et la goyave sucrée, non ! La Hélène dont il est question, c’est la femme moderne, un flambeau du soleil, une femme laborans, l’amour idéal, dont l’indifférence signale l’inaccessibilité, introuvable et partout en même temps. Elle résonne dès les premières minutes du film comme une présence-absence, véritable métaphore d’élans vitalistes et de l’idée pure de la post-modernité : une femme libre, mère et mariée, oscillant entre travail social et économique.

La dernière femme.

Des Goyaves et des Pommes est pensé comme une enquête au cœur de Bruxelles à la recherche d’une femme du nom d’Hélène, une femme décrite comme moderne, dont les vertus sont ébranlées et usées par l’aliénation du travail. Le dispositif du film répond parfaitement au genre d’investigation dans le réel. À l’aide de micros-trottoirs et de confidences, nous arpentons la moindre rue à la recherche du concept « Hélène ». Celui-ci est décrit comme toute personne moderne aliénée par son travail, se perdant elle-même, stressée, n’arrivant plus à se projeter.

Hélène a l’illusion de pouvoir transformer le monde donné par son travail, elle a l’illusion du dépassement. Elle se heurte au monde de l’utile qui prédomine aujourd’hui sur tout le reste. La satisfaction des besoins matériels est le leitmotiv qui conduit l’existence. Le travail comme une domestication de l'individu, lui imposant des normes, des codes, des modes de comportement, un rythme de vie. Course effrénée et absurde vers une norme sociale acceptable. Une course effrénée vers l’illusion du bonheur.

Les protagonistes du film questionnent de façon pertinente les enjeux du travail et l’articulent avec la notion de bien-être et de bonheur ainsi que la place de la femme dans la société moderne. Dans leur geste de sollicitude, micros à la main, caméra à l'épaule inébranlable, ils nous exposent les êtres rencontrés, seule nécessité à la réalisation de soi. Car même si nous mangeons des pommes au travail, la vie de la goyave est ailleurs. 

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