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Iron Sky 2: The coming race de Timo Vuorensola

Publié le 25/04/2019 par Grégory Cavinato / Catégorie: Critique

Le Réveil de la Farce

Récapitulatif : Il y a 7 ans, le BIFFF, en mode « total tirelipimpon » nous proposait le premier Iron Sky, co-production improbable entre la Finlande, l’Allemagne, l’Australie et la planète Saturne, réalisée par un grand dadais finlandais déjà auteur d’une parodie pas très finaude de Star Trek intitulée Star Wreck : In the Pirkinning. Dans Iron Sky, des Nazis ayant formé un Quatrième Reich sur la lune attaquaient la Terre à bord de leurs zeppelins spatiaux. Si ce concept s’autorisait quelques libertés historiques, le film fut un tel succès public en festivals, film culte par excellence, que l’annonce d’une suite avait ému la communauté fantasticophile toujours prompte à répondre présente lorsqu’il s’agit de gags farfelus à base de casques à pointes et de choucroute garnie. Après la mise en ligne en 2014 d’une bande-annonce provisoire (dont les effets spéciaux n’étaient même pas terminés) et une attente de cinq ans supplémentaires, on aperçut des hordes de vieux adolescents quitter les sous-sols de leurs parents pour se diriger dans les salles de Bozar vêtus de leurs t-shirts les moins troués et de leurs plus belles casquettes de Black Metal pour se payer une bonne tranche de grosse rigolade. Ça n’a pas raté, la séance d’Iron Sky 2 fut très vite ausverkauft. Et les fous rires de se substituer au déodorant, accessoire dont certains festivaliers buveurs de Maitrank ont encore trop souvent du mal à saisir l’utilité…

En réalité, le premier Iron Sky, comme beaucoup de comédies potaches, s’avérait trop brouillon, cheap dans le mauvais sens et loin d’être aussi drôle qu’il le laissait paraître, se reposant paresseusement sur un concept qui, il faut bien l’avouer, relevait du pur génie. Iron Sky n’était finalement rien d’autre qu’une variation nordique sur les fameuses productions Asylum américaines, ces séries Z navrantes produites à la chaîne et faussement subversives : 50% d’effets numériques ratés, 50% d’acteurs en roue libre surjouant la moindre virgule, 100% n’importe quoi ! Pourtant, difficile de dissimuler sa joie de geek adepte de plaisirs coupables après la vision de cette suite ! En bref, si un Adolf Hitler mi-nazi, mi-reptile chevauchant un tyrannosaure de combat sur la lune vous met un grand sourire béat sur le visage, Iron Sky 2 est exactement le film qu’il vous faut, garanti à 100% sans commentaire social et nullement approuvé par les Frères Dardenne. Et la bonne nouvelle, c’est que Timo Vuorensola a retenu les leçons de ses erreurs de jeunesse.

Vingt ans après les évènements du premier épisode, la Terre, transformée en immense dépotoir à ciel ouvert, se remet d’une guerre nucléaire assez définitive. L’ancienne base lunaire nazie est devenue le dernier refuge de l’Humanité et, au fil des décennies, des colonies se sont formées avec leurs propres idéaux fascistes et leurs religions. Parmi celles-ci, les Jobistes, sortes de scientologues New Wave vouant un culte aux préceptes du Dieu Steve Jobs. Mais la base lunaire se détériore et le temps est désormais compté. Une rumeur se met alors à circuler sur d’éventuels survivants habitant une cité souterraine au centre de la Terre. Une joyeuse équipe d’explorateurs est envoyée sur place dans l’espoir de trouver une nouvelle résidence. Ils vont découvrir un monde peuplé de dinosaures nourris à l’Ovomaltine et dirigés par le peuple Vril, une race de reptiliens à la solde d’un certain Adolf Hitler dopé à la Duracel. À la table de l’increvable dictateur se sont également invités quelques méchants historiques tels que Margaret Thatcher, Vladimir Putin, Caligula, Kim Jong-Un, Oussama Ben Laden, Josef Staline, Idi Amin et Jésus-Christ.

Alors qu’Iron Sky pêchait par un amateurisme agaçant, ce successeur au bifidus actif a fière allure. Faisant preuve d’une ampleur étonnante dans ce genre de projet lourdaud, ce second épisode ressemble déjà beaucoup plus à une production professionnelle, l’amateurisme de l’original laissant la place à un souffle épique. Certes, nous restons dans le registre de la grosse comédie qui tâche, cherchant à exploser les limites du politiquement correct et du bon goût comme le fait chaque semaine un épisode de South Park. Tous les gags ne fonctionnent pas mais la plupart atteignent leur cible et provoquent l’hilarité. La parodie du culte de la scientologie, dirigée par un gourou pervers au collier de barbe douteux (Tom Green) fonctionne à merveille

Outre un spectacle visuellement étourdissant et un casting de comédiens très impliqués (à commencer par le légendaire Udo Kier, cabotinant à souhait dans le double rôle d’Hitler et de son frère jumeau, lançant des « Mutter Ficker ! » à qui mieux mieux), Iron Sky 2 étonne par sa sincérité. Le scénario ne se contente pas d’aligner les gags idiots et les séquences spectaculaires. Ne rechignant jamais à aller chercher l’émotion entre deux carabistouilles, Vuorensola cherche également à peaufiner les relations entre ses héros d’opérette, à les rendre attachants. C’est le cas de l’héroïne (Lara Rossi), irrésistible et d’un sidekick comique (Kit Dale), costaud au Q.I. en berne, aussi idiot qu’amusant. Slalomant allègrement entre l’épopée interstellaire, la série Z et le film d’aventures old-school, Vuorensola soigne ce qu’il avait bâclé sept ans plus tôt. La photo est superbe, les cadrages inspirés, les SFX ont de l’allure et on s’amuse bien trop pour s’attarder sur le fait que le scénario, trop généreux, part dans tous les sens et lance trop d’idées qu’il ne développe pas toujours. Ce trop-plein de matière sera exploité prochainement dans un troisième volet en tournage, intitulé The Ark : An Iron Sky Story, qui nous promet rien moins qu’Andy Garcia en leader des Illuminati !

Entièrement financée par le site de crowdfunding Indiegogo, ce second volet est une co-production entre la Finlande, l’Allemagne… et la Belgique ! Tourné en grande partie à Anvers, aux Studios AED de Lint, Iron Sky 2 compte un nombre exceptionnel de producteurs et de techniciens flamands dans ses rangs. Evidemment, dès qu’il s’agit de rigoler ou de combattre les Nazis, nous ne sommes pas les derniers…

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