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La Vie sexuelle des Belges 4 - La Jouissance des Hystériques

Publié le 01/01/2006 par Grégory Cavinato / Catégorie: Sortie DVD

La Jouissance des Hystériques (1998)

« L’amour c’est donner quelque chose que l’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas. » Lacan

 La vie sexuelle des Belges

 

Et c’est reparti pour un tour. Comment commencer un film dédié à l’amour de Jan Bucquoy pour les femmes ? En filmant deux pigeons en train de copuler. « Ma fille m’avait quitté. J’ai eu une nouvelle crise d’hémorroïdes et je me sentais seul comme un rat. » Voici en une phrase la raison d’être du nouveau chapitre de la saga de La Vie Sexuelle des Belges. Son principe ?
Jan Bucquoy, célibataire, organise des castings féminins pour le tournage d’un nouveau film et fait lire à ses recrues des textes révolutionnaires. « C’est bien connu, les mecs font du cinéma pour se taper des actrices. » Et Jan d’abuser de toutes les prétendantes en leur sautant dessus une après l’autre, tentatives souvent suivies de gifles mémorables…

 

Ce qui nous vaudra un dialogue pas piqué des vers :

INT. NUIT – CHAMBRE A COUCHER

Jan Bucquoy et une actrice à moitié endormie sont au lit. Jan agresse sa copine par derrière.
LA COPINE (furieuse)
Attends, j’ai mes règles !
JAN (déçu)
… T’as vraiment très fort tes règles ou… ?...
Bucquoy pose un regard triste mais assez juste sur la vie de couple comme la société l’impose aujourd’hui : les couples sont un échec parce qu’ils oublient de se réinventer, ils représentent un cocon où l’on fait fi de tous ses désirs et où l’on « reste ensemble parce que c’est trop dur d’être seul ». Impitoyable, dur, sans équivoque… Mais observez les couples qui vous entourent et, dans 80 % des cas, vous serez bien obligés d’acquiescer.
Jan Bucquoy offre ici une « réflexion » sur la vie de couple et sur le sens de la vie, en fait un immense canular prétexte pour recruter une armée d’anarchistes qui, avec lui, commettront le coup d’état du 21 mai 2005 en prenant possession du Palais

 

Royal.
En conférence de presse pour annoncer son coup d’état, Jan Bucquoy nous éclaire de son avis éclairé sur la société dans laquelle nous vivons, une société trop triste où les gens acceptent tout et qui ne les intéresse pas :
« Notre société est un véritable camp de concentration, invivable et triste, rongé par une misère intellectuelle et sexuelle et par le refus des autres discours… Si Dieu n’existe pas, … et il n’existe pas, tout ce que nous avons comme capital c’est notre capital temps sur cette planète. Donc il faut faire de nos vies un paradis… Nous vivons dans une société où nous ne prenons pas en compte nos propres désirs, mais où nous vivons pour satisfaire ceux des autres, des médias, de papa/maman, des instituteurs, des patrons, de l’armée, etc… Je veux inspirer les gens à refuser cette réalité… Il faut prendre en compte nos vrais désirs : courir nus dans les prés après des vierges et jouir sans entraves…»

 

Son but ? Une révolution pour un monde plus sympa et plus marrant où nous cueillerons dès aujourd’hui les roses de la vie. En finir avec une société basée sur le travail, créer une utopie basée sur la jouissance et le repos, où « l’on pourra réaliser nos désirs et arrêter de se lever à 4h du matin pour faire un boulot de con. » Séquence pleine de tendresse : Jan face à sa fille Marie à qui il résume sa conception du rôle du père : « Montrer la société telle qu’il la voit et guider ses enfants pour les aider à faire un choix. Leur donner l’esprit critique pour ne jamais être soumis à la pensée dominante, quitte à préférer la folie à l’acceptation aveugle de ce monde. » Ce à quoi Marie répondra préférer l’alcool et le joint plutôt que le nihilisme. Et Jan Bucquoy, affirmant ne pas prendre de drogue « parce qu’il est un héros des temps modernes » d’enchaîner par un « ma fille s’est suicidée et est enterrée au Père Lachaise.» Ce qui évidemment est totalement faux. Le film enchaîne ensuite sur une série de saynètes où Jan, grand réalisateur belge, s’engueule et se met à dos toute son équipe. Bucquoy caricature ici le cinéma en général et se moque de Godard qui s’en prend plein la gueule. Dans son nouveau film, pas de règles, pas de scénario, juste une équipe qu’il tyrannise (notamment Noël Godin dans le rôle de Pierre Mertens ), avant de lui dévoiler son plan : le fameux coup d’état. Evidemment, il était prévisible que toute son équipe l’abandonne et le laisse préparer son fameux coup tout seul comme un imbécile-couillon.

 

Egocentrique jusqu’au bout des ongles, Bucquoy va pourtant aller jusqu’au bout de sa démarche. Et dans les bonus de ce DVD ce coup d’état perpétré le 21 mai 2005 nous est montré en long et en large. Son idée ? Armé du nouveau drapeau belge (un grand B à côté d’une banane), il décide de prendre possession du Palais Royal pour en faire des logement sociaux et propager la révolution en lançant un nouvel hymne national : « Amusez-vous, foutez-vous de tout, la vie est si courte après tout ! » Son programme ? En voici en petit résumé :
- L’abolition des propriétaires.
- La gratuité des transports en commun.
- La gratuité de l’énergie.
- La suppression de l’angoisse généralisée.
- L’abolition de la bureaucratie.
- Les élections remplacées par un tirage au sort.
- Organiser une société où nous vivrions nus comme des singes, copulant à longueur de journées.
Un bien beau projet, utopiste et rigolo. Suivi par une foule immense d’au moins 5 personnes (dont l’ami Godin), son coup échouera bien sur lamentablement. Mais Jan décrit son coup d’état comme un « coup permanent pour une jouissance totale » et appelle la population à le rejoindre tous les 21 mai de chaque année à partir de 2005. A vos calendriers ! Et force est de constater que Bucquoy est quand même plus marrant et sympa quand il fustige la monarchie et ses chapeaux ridicules que quand il s’en prend à des sujets sérieux comme la lutte ouvrière.

 

La Jouissance des Hystériques, c’est l’anar Bucquoy dans sa forme la plus drôle et la plus tendre, la plus stupide et la plus engagée. Entre paroles bien senties et vérités qui font du bien à entendre, Bucquoy nous prouve que si l’anarchie ne sert absolument à rien et est un échec total dans cette société absurde et inhumaine, elle a néanmoins encore de l’avenir devant elle ! Quant au sens de la vie, jadis illustré par les Monty Python, c’est Marie, la fille de Jan qui nous le résume de bien belle manière : « Y’en a pas ! »… A méditer.


 Ce DVD contient en bonus :

- L’historique du coup d’état du 21/05/05.
- Un reportage sur le coup d’état raté.

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