Une petite silhouette revêtue d’un drap blanc sonne aux portes. Ce n’est pas des bonbons que ce fantôme demande, mais des berceuses. Or les berceuses de la Pologne originaire semblent oubliées à jamais. Alors le petit fantôme part en quête de ces chansons lointaines dans une sorte de road movie décousu et tendre où par un beau retour en grâce, quelques berceuses reviendront du pays natal.
Joséphine Lasquier et Jérôme Pauly signent un petit film à la fois tendre et triste qui part d’une demande restée sans réponse. Ici, il ne s’agit pas du fameux « raconte-moi une histoire » des enfants, mais plutôt d’un « chante-moi une chanson » resté sans réponse. Puisque cette grand-mère Suzy semble avoir tout oublié des chansons de l’enfance en question, le petit fantôme prend la route vers la Pologne pour les retrouver lui-même. Mais il n’y a pas que de la joie et de l’innocence dans le temps de l’enfance. Il y a parfois aussi beaucoup de gravité et de mélancolie, surtout quand les chansons, les souvenirs, les langues viennent d’un ailleurs qui s’est fondu dans l’oubli, volontairement ou non. Petite balade errante tissée de mille visages, de paysages attrapés au vol, d’éclats de musiques qui sont de là-bas, mais qui pourraient être de n’importe où, Le Voyage de Ghosty et grand-mère Suzy sinue dans une matière hétéroclite que la voix off, en forme de conte, unifie dans la matière de la quête. La dimension enfantine se teinte ici sans cesse de la gravité du déracinement et de la mélancolie de ce qui toujours manque. Peu à peu, le film trouve sa grâce dans les musiques attrapées au vol et finalement ramenées à Suzy en signe de retour à l’envoyeur. Et la beauté de ce petit film tient en partie à ce chant retrouvé devant l’écran qui vient boucler la boucle de ce qui se transmet, quand c’est aux enfants que revient le rôle de recoudre la mémoire des adultes, dans un don enfin rendu.
