Mireille et Lucien de Philippe Blasband
L'amour est-il autre chose que deux fragilités qui se rencontrent, qui s'acceptent et qui s'épaulent ? C'est ce que semble dire Philippe Blasband dans la très belle histoire de Mireille et Lucien qu'il met en scène dans son troisième court métrage comme réalisateur. C'est une rencontre : celle d'un homme qui sort de prison, condamné pour un crime de pédophilie qu'il n'a pas commis, et d'une femme rejetée du fait de sa disgrâce physique, et qui vient de subir l'opération esthétique tant désirée.
Deux ex-monstres donc, revenus parmi les humains et résolus à réapprendre à vivre normalement. Mais de telles blessures ne sont pas simples à guérir et les pièges que la vie met sur votre route sont nombreux. Il en faut de l'amour mutuel pour pouvoir grandir soi-même, et aider l'autre à renaître.
Une histoire qui frappe juste, ici encore. Mais ceux qui connaissent le travail de scénariste et d'écrivain de Blasband (son recueil de nouvelles Quand j'étais Sumo, par exemple) ne doutent pas de ses talents de conteur. Il est complété par une mise en scène sensible et servie par d'excellents comédiens, impeccables (chapeau bas à Serge Larivière et Aylin Yay). En outre, le film se présente sans défauts techniques majeurs. L'oeuvre devrait donc emporter sans problème ses spectateurs dans son sillage. Pourquoi, alors, reste-t-on quelque peu sur son quant-à-soi ? Qu'est-ce que cette distance qui subsiste entre nous, l'histoire et les personnages, et qui fait qu'on ne s'identifie pas vraiment ? Quelque chose de l'ordre du découpage, du choix des scènes, de la lisibilité. Cela influe sur le rythme, crée des cassures. Certains éléments paraissent répétés et d'autres plus difficiles à intégrer par manque de référents. Problème de montage? Peut-être. Il y a des scènes formidables, mais d'une force écrasante et qui déséquilibrent les autres (celle où le couple se voit refuser une demande d'adoption, par exemple). Quoi qu'il en soit, pour un scénariste considéré comme un des grands en Belgique, c'est quand même assez étonnant. A moins que Philippe Blasband n'ait pas vraiment eu pour souci premier d'intégrer son histoire dans le format du court métrage?
Mireille et Lucien
35mm, format : 1.85, Couleur, 21'
Scén. et réal. : Philippe Blasband. Image : Vincent Van Gelder. Son : Dan Van Bever et Vincent Nouailles, Mont. : Ewin Ryckaert, Mus. : Olivier Thomas. Int. : Serge Larivière, Aylin Yay, Martine Willequet, Pascal Lefebvre, Patrice Minck, Alice De Visscher. Prod. : Patrick Quinet
(Artemis Productions)