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Mobile Home de François Pirot, critique

Publié le 15/09/2012 par Dimitra Bouras / Catégorie: Critique

Dans le titre du film, tout est dit : le personnage principal étant un mobile home, un lieu de séjour itinérant. Les habitants ? Deux trentenaires qui, voyant les années s'écouler à grande vitesse, décident de rattraper leurs rêves d'adolescents, quand ils passaient des nuits blanches à noircir du papier gras et remplir des casiers de vidanges de bière, à chanter et gratter les cordes de leur guitare. A l'âge tendre de la peau délicate et du regard clair, le sac à dos et la tente étaient des éléments superflus à la panoplie du globe-trotteur. Une dizaine d'années plus tard, on pense à préserver ses os et ses muscles et on opte pour la couche d'un matelas plutôt que celle des herbes folles.


Si l'option « toit-douche-cuisine-etc. » est fournie avec, pourquoi pas ? Dans un dernier élan d'aventure, nos trentenaires décident de couper les liens qui les ancrent à leur vie sédentaire et ennuyeuse; le vieux père malade pour l'un, la copine avec qui on n'arrête pas de se séparer pour l'autre. La copine, c'est Sylvie (Anne-Pascale Clairembourg), celle qui a le mauvais rôle, qui dit les vérités qui font mal à entendre. On peut toujours se comporter comme le singe aux yeux bandés et aux oreilles bouchées, mais comment faire quand on a des rêves plein la tête et qu'on ne veut pas les taire ni tourner la page de son enfance ? Alors tant pis, on y investit son héritage (encore à recevoir), on permute la maison que l'on voulait aménager avec un mobile home qu'on peut emporter et voilà nos amis partis sur les routes du monde. Les étapes ? Les cueillettes de fruits, le ramassage de pommes de terre et, qui sait, le pâturage des brebis.

Cette comédie, à mi-chemin entre le road-movie et le roman psychologique, repose entièrement sur les dialogues et le jeu des acteurs. Les trentenaires, Guillaume Gouix et Arthur Dupont, amis dans la vraie vie, sont d'une fraîcheur énergisante. Le premier, Julien, plus réservé et craintif pour son père (superbement interprété par Jean-Paul Bonnaire) se fait continuellement secouer par son acolyte, Simon, jeune chien fou toujours à la recherche de l'ouverture de la cage.

François Pirot, aux commandes de son premier long métrage, déploie avec maîtrise et assurance ses talents d'écriture. Co-scénariste de Nue Propriété et Elève libre de Joachim Lafosse, il cisèle ici les répliques à merveille, imagine des situations juste ce qu'il faut de burlesques et surtout, s'offre un casting gagnant. Aux côtés des deux amis, il y a Jean-Paul Bonnaire, l'homme à tout faire des Choristes, qui donne la touche populaire, la sagesse de l'âge, celle qui repositionne les jeunes et, par la même occasion, le film. Catherine Salé est parfaite aussi dans son rôle de femme libérée, mère équilibrée et amoureuse experte.

Un film drôle, finement cocasse, où le réalisateur se moque gentiment de ses personnages tout en les rendant attendrissant. Un film qui réveillera des envies enfouies dans la blancheur des cheveux ou qui donnera l'énergie nécessaire à la construction des châteaux en Espagne !

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