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Moloss d’Abdelakrim Qissi et Abel Ernest Tembo

Publié le 06/09/2022 par Kevin Giraud / Catégorie: Critique

Presenté en avant-première mondiale au Brussels International Fantastic Film Festival, notre désormais bien établi BIFFF qui fête cette année ses quarante ans d'existence, Moloss d’Abdelkrim Qissi et d'Abel Ernest Tembo est une production fascinante à bien des égards. Et c'est avec son équipe au grand complet (ou presque) que les salles du Heysel ont vibré en cette chaude fin de mois d'août.

Moloss d’Abdelakrim Qissi et Abel Ernest Tembo

Moloss, c’est ce qu’on pourrait appeler un actioner. De ce genre de films où les poings parlent plus que les langues, et où le personnage d'Abdelkrim Qissi, Moloss, est aussi volubile qu’un Sorceleur des grands jours. Mais il vaut mieux qu’il se taise, car comme on l’apprend au fur et à mesure que l’intrigue se tisse, la voix de Moloss a des priorités surnaturelles. En ajoutant ce twist fantastique à ce qui est déjà un bel exemple de cinéma d’action à la belge, les cinéastes déploient un second lexique tout aussi vaste que le premier, et s’en donnent à coeur joie. Entre duels psychiques, joutes verbales et combats à grands renforts de poings, le film est plus que généreux. Et l’on s’extasie devant l’ingéniosité déployée par l’équipe pour pallier à leur manque évident de budget, sans vouloir pour autant se priver de grands moments d’action, façon Hollywood. Et l’on jubile, lorsque l’on découvre les clins d'œil - certes bien appuyés, mais néanmoins assez cocasses - des réalisateurs aux films de cowboys, de gangsters et d’arts martiaux qui ont dû marquer leur enfance cinématographique. Qui a dit que le blouson noir était passé de mode ?

Côté casting, Abdelkrim Qissi est une force tranquille mais dont la psyché est plus complexe qu’il n’y paraît. Et l’on découvre petit à petit la diversité de son jeu, qui se révèle dans les séquences d’émotions parsemant le film. Car Moloss ne s’est pas toujours surnommé ainsi, et sous le monstre se cache un être de rêves et d’espoirs déchus, mais aussi d’amour pour sa femme et par dessus tout pour sa fille. Une enfant qu’il protège envers et contre tout, reprenant ici le trope de nombreux films d’action à la Taken, revisité à la sauce belgo-belge. Opposé à lui, un Patrick Ridremont méconnaissable, qui semble s’amuser de son rôle que l’on vous laisse la surprise de découvrir.

Enfin, la Belgique est incontestablement l’un des personnages principaux de Moloss. De la côte bien connue des vacanciers d’un jour, à la gare maritime bruxelloise fraîchement rénovée, les cinéastes s’amusent à transformer notre plat pays en décor de cinéma américain, jonglant tour à tour avec des ambiances de mélodrame, de western ou de polar tendu. Quelques belles idées d’éclairage et de plans apparaissent ainsi au détour de l'œuvre, dans les sous-sols de Tours & Taxis ou lors de la mémorable séquence du chantier ferroviaire. De quoi régaler vos pupilles, intriguées par une première scène de castagne en noir et blanc plutôt réussie, et en attendant la conclusion du film, tout aussi sympathique.

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