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Panta Rhei de Wouter Bongaerts

Publié le 16/04/2019 par Bertrand Gevart / Catégorie: Critique

Le ciel flamand gronde sur la plage de sable épais et brun comme la boue. La mer, fougueusement folle, annonce au monde la perte d’un rorqual échoué. Avant qu’il soit soigneusement disséqué, c’est le grand ballet des adieux, face à face, comme deux amis qui se disent au-revoir. Stefaan, biologiste spécialiste du monde marin est là, debout, d’une fixité déconcertante, face à ce rorqual toujours plus imposant. Il est naufragé de sa propre vie, submergé par la vague puissante de la mélancolie que seuls les dieux moroses épris de gris connaissent. Tourmenté par ses sentiments et sa conscience, Stefaan rentre chez lui et affronte la colère de l’eau : inondations et robinets qui coulent à flot, pluie incessante. Tout comme les baleines échouées, il est un fuyard de l’eau. Après une succession d’échecs et de déprimes ponctués d’impuissance, Stefaan tente et réussit à réinvestir son ordinaire, sa propre existence, guidé par la baleine qui lui montre l’amour.


Ce court-métrage d’animation en 2D réalisé par Wouter Bongaerts nous enfonce dans l’iris profond de cet animal, sommant de nous rappeler ce même rorqual échoué en 2018 sur la côte belge. Le réalisateur parvient à faire correspondre une thématique écologique avec la tragédie des animaux marins échoués à celle d’un homme esseulé et perdu dans un paysage apocalyptique. Le dessin est surprenant, déformant volontiers les traits au profit des émotions jetées dans les grands paysages poétiques de Flandre.

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