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Pour Toujours (For Ever) d'Eric Pauwels

Publié le 01/02/1999 par Théo Salina / Catégorie: Critique

De l'aube au coucher, René se promène. Il traverse le silence de ses Polders, et regarde. La nature. Les choses simples. Comme un arbre dans le vent. Comme la brume qui, sans bruit, caresse les champs.

Pour Toujours (For Ever) d'Eric Pauwels

Puis la lumière de l'automne, qui perce le toit d'une chapelle ou d'une grange en ruine. Au loin, une péniche. Ni vu ni connu, du coin de l'oeil, c'est un bouton du chemisier de Marie, sa soeur, qui repasse gentiment pendant que Puff le chien roupille dans le panier à linge. Et le dimanche, hors saison, la plage à marée basse où entre deux coquillages il ramasse quelques objets et vieux papiers échoués... Arrimé à son petit bout de Gaule, un irréductible attendri. On devine sans mal que quand ce curieux oiseau croise le regard d'une vache ou d'une chouette, quelque chose se passe entre eux. Quelque chose d'aussi intense qu'impalpable. La même chose sans doute qui ce jour-là dépose au milieu des champs un étrange épouvantail : professionnel de l'image, Philippe avait pointé vers le ciel d'orage l'objectif de son appareil photo. Très vite, le petit monde de René devient un sublime sujet de reportage. Portrait de famille...

Mais Puff refuse de garder la pose. Et pour le face caméra, s'il n'est pas obligé de parler, René doit enlever la petite peluche sur le col de son veston. Le soir, autour du feu, ses quelques amis sont peut-être plus excités que d'habitude : "On boit beaucoup, parfois, dans ce pays. Normal, on est sous le niveau de la mer!" A travers le contemplatif quotidien de Pour toujours (For Ever), Eric Pauwels confronte la machine à l'oeil nu. La parole à l'écoute patiente et effacée. La mise en scène, aussi réaliste soit-elle, à la sensibilité pure et intacte d'un Josse De Pauw presque aussi inspiré que dans le génial Just Friends. Dans ses yeux vagues rayonnent une profonde sérénité, une intime sagesse, parfois une trouble nostalgie. Alors René empreinte le caméscope, et c'est l'unique image de sa vie qui tourbillonne bientôt sous un ballon d'hélium.

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