Semah de Berna Güzel

Tout est en noir et blanc, avec quelques touches d’un rouge vif, les dessins sont minimalistes et semblent être réalisés au pinceau, à l’encre et au lavis.

On assiste d’abord au voyage de grues cendrées, à leur vol souple et délicat. Elles viennent ensuite se poser sur la terre et le corps des oiseaux laisse place à une femme et à un homme. Ils dansent. Chacun de leur côté d’abord, puis ensemble. Ils dansent au rythme de la musique. Aucun mot n’est prononcé, on admire seulement la danse et on se laisse bercer par les notes. Puis, le style change. Le lavis disparaît et les deux personnages aussi. Les dessins, noir sur blanc puis blanc sur noir, se simplifient encore, ils deviennent abstraits mais continuent de danser en rythme.

Enfin, une voix, la seule voix du court-métrage, prend le dessus. Elle explique la danse rituelle et vient clore le récit.

On comprend qu'il s’agit du Semah, une danse rituelle pratiquée par les Alévis qui s’inspire des mouvements de la lune, du soleil et des planètes. Une danse qui imite le vol des grues cendrées. Une danse qui est le symbole de la paix, de la liberté, de l’égalité, de la communauté et de la bénédiction, dont les mouvements des mains symbolisent la relation entre la terre et les Hommes. Ce rituel ici mis en scène a longtemps été interdit en Turquie.

Pour la réalisatrice, née en Turquie et habitant en Belgique, ce film est peut-être l’occasion de lui rendre ses lettres de noblesse et de braver l’interdit trop longtemps en place.

Ce court-métrage suit la lignée des sujets de prédilection de Berna Güzel : son Anatolie natale et les peuples du monde. Un amour de la culture qui se traduit encore ici, à travers ce film poétique.