Et si changer le monde commençait dans l'assiette de tout un chacun ? C'est en tout cas le postulat de Ludovic, initiateur du projet Tandem local, documentaire et qui sortira sur les écrans en septembre 2021.
Un voyage à vélo de deux mois à travers les dix provinces belges, et une équipe de sept aventuriers du changement portés par une envie d'aller à la rencontre des petits producteurs et de promouvoir un mode de vie local, durable et social.
"J'aimerais que les gens réalisent que l'agriculture peut les aider à retrouver la culture ", énonce l'un de ces agriculteurs moteurs du renouveau. Comme si l'humain s'était perdu dans la modernité, et qu'à travers ce retour à la terre, un retour à la vie sociale était possible. Une approche peut-être naïve, mais qui fait écho à celle très optimiste et engageante du projet global de Tandem local.
Et c'est cette même énergie que l'on ressent dans l'ensemble des témoignages. Une volonté de faire bouger les lignes, de ne pas se cantonner aux directives macrocosmiques, et de porter soi-même la solution lorsque celle-ci n'existe pas encore. Il en est ainsi du projet de semences locales de Fanny, des œufs produits par Luc, ou de l'élevage en pleine herbe mené par Stéphane. Autant d'initiatives citoyennes aux portées différentes, mais avec la même hargne.
Ils en ont gros sur le cœur, tous ces acteurs du changement, au point que l'équipe du film se doit parfois de tempérer leurs propos par le biais d'une voix-off accompagnant et synthétisant le propos du récit. Mais de manière générale et plutôt que de ressasser leur frustration, ces initiateurs de projets vont de l'avant et promeuvent chacun à leur manière un mode de vie, un mode de consommation différent. On dit bien promouvoir, car c'est peut-être l'un des premiers mots qui vient à l'esprit lorsqu'on découvre le film. Dans sa construction comme dans son rythme, les influences d'une esthétique publicitaire se font en effet sentir, au point si l'on n'y prête pas attention, de frôler le rejet par nos cerveaux trop habitués à se méfier de ces mécaniques. Mais pour mieux séduire, ne faut-il pas après tout reprendre des codes déjà éprouvés, en les retournant pour les mettre au service du bien commun ? Car il n'est pas ici question de repli national, ou de communautarisme, mais bien de communiquer, par le biais de ce film à débat, que le mythe du progrès et de l'exploitation planétaire n'est plus tenable pour les générations futures. Le tout au travers d'une démarche honnête, sans trop de leçons, mais sans toutefois inviter à l'attentisme.
Intercalant différents styles de captation, Tandem local a tour à tour l'air d'une production amateur (entre selfies et plans à la GoPro) et d'un documentaire de haut vol (des plans drone impressionnants alternant avec des images de nature d'une grande beauté). La découverte d'une autre Belgique, au-delà des sentiers balisés du tourisme.
Ce qui marque également dans ces images, c'est la matérialité des produits capturés, leurs textures. Entre bruissements de paille, tintement des graines et caquètement des poules, l'équipe accentue également l'authenticité de ces aliments, les rendant d'autant plus attrayants. On en mangerait.
Dans son approche cinématographique, Tandem local ne fait pas bouger les lignes du genre, sans pour autant avoir à rougir de sa forme. Mais par son optimisme, sa bonhomie et l'accumulation de ses témoignages positifs, le documentaire pousse à la réflexion et invite au changement, petit à petit. Et ce, par le biais d'un beau et humble moment de cinéma, et d’une belle histoire humaine.
