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En DVD : L'Enfer de Danis Tanovic

Publié le 13/07/2006 par Katia Bayer / Catégorie: Sortie DVD

Quatre ans après No Man’s land (2001) salué par la critique internationale, lauréat de l’Oscar du Meilleur film étranger et de nombreux autres prix à travers le monde, le cinéaste belgo-bosniaque Danis Tanovic était revenu au long métrage avec L’Enfer, l’adaptation d’un volet de la trilogie initiée et co-écrite par Krzysztof Kieslowski et son scénariste Krzysztof Piesiewicz. « Paradis, enfer, purgatoire » en était resté au stade de projet avec la disparition prématurée de Kieslowski, épuisé par les tournages simultanés de Bleu, Blanc, Rouge en seulement un an et demi. L’adaptation, livrée par Tanovic (une tragédie moderne couplée au mythe de Médée) et dédiée à K.K., est désormais disponible en DVD.

L’Enfer. Le film

Jaquette de L'Enfer de Danis Tanovic

A Paris, trois existences vécues en parallèle aux origines pourtant communes. Ce sont celles de trois jeunes soeurs qui, suite à un drame familial, ont cessé tout contact. Chacune mène sa vie entre désir refoulé, soumission et lutte. Séparées, elles portent le même nom mais aussi un secret de famille douloureux. Qui sont ces femmes ? Sophie, l’aînée, femme au foyer s’accroche à son mari qu’elle soupçonne d’adultère. Céline, célibataire, consacre ses journées à s’occuper de sa mère handicapée. Et Anne, la cadette, veut à tout prix sauver sa relation avec un homme marié qui n’est autre que son professeur d'université. L'enfer de chacune ne cessera que lorsque le destin, sous les traits d’un inconnu, interviendra.

L'Enfer est personnalisé par un casting plutôt sympathique : trois comédiennes intéressantes (Emmanuelle Béart, Karin Viard et Marie Gillain) donnent la réplique à Carole Bouquet, Guillaume Canet, Jacques Gamblin, Jacques Perrin, Jean Rochefort ou encore Georges Siatidis, déjà remarqué dans No Man’s land. Outre les acteurs, le film a bénéficié des atouts d’une excellente équipe technique : les plans, les cadrages, la lumière, la musique, les couleurs distillées (une par soeur), les décors et les accessoires servent les propos avec élégance et esthétisme.

Le making of. « Les réflexions d’Enfer »

Soutenu par le Centre du Cinéma et de l’Audiovisuel de la Communauté française de Belgique, le making of de près d’une heure est un bonus documentaire plutôt réussi. Toute l’équipe s’y trouve, de Tanovic qui parcourt la ville en voiture, au directeur photo en passant par l'attachée de presse et la doublure de Bouquet. Tous évoquent leur confiance et leur tendresse envers le metteur en scène, la préparation et la construction de leurs actions au service du film. En référence à Kieslowski, la décoratrice Aline Bonetto, familière des projets filmiques français, explicite le code de couleurs défini selon les personnages féminins principaux et leurs intériorités. Tanovic, lui, parle du caractère féminin très fort du sujet et en arrive à être étonné que ce soit deux hommes qui en aient rédigé le scénario. A noter également : l'intervention du chef opérateur, Laurent Dailland, qui cite, tout sourire, la satisfaction du bon plan et celle d'Emmanuelle Béart, éminemment touchante car joliment simple dans L'Enfer et son corollaire en of, qui estime qu'une fois sur le tournage, il n'y a plus d'image extérieure de l'acteur.

Les interviews

Parmi les bonus, figurent également deux interviews d’une durée totale de quinze minutes. Danis Tanovic et Marie Gillain mentionnent entre autres le choix du scénario/du film, leurs motivations, la direction des acteurs/ la préparation du rôle et le rapport au tournage. Matière peut-être un peu redondante avec le riche making of, ce qui se retient surtout, c’est une anecdote liée à l’existence même du film. Tanovic raconte que son engouement pour L’Enfer n'a pas été immédiat. Lorsqu'il découvre le scénario il y a cinq ans, il le referme, lui préférant nettement le Purgatoire. Plus tard, son agent (qui s'occupait également de la carrière de Kieslowski) acquiert les droits de la trilogie. Tanovic relit le chapitre qui l'intéresse et l'abandonne car « ça parlait de guerre et qu'il n'[a] pas très envie de retomber dans toutes ces histoires ». Avant de parcourir une nouvelle fois les pages de L'Enfer. Sa nuit deviendra  blanche : il se demande comment il a pu passer à côté d'une histoire qui s'avère être belle, dure, humaine.
L’Enfer de Danis Tanovic, produit par A.S.A.P., VF, S-T néerlandais, édité et distribué par Belga Home Vidéo

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