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Entretien avec Arta Dobroshi pour Le Silence de Lorna

Publié le 01/07/2008 par Matthieu Reynaert / Catégorie: Entrevue

À 28 ans, Arta Dobroshi, originaire de Pristina, la nouvelle capitale du Kosovo, mais qui se voit plus comme une citoyenne du monde, est la nouvelle trouvaille des frères Dardenne. Et quelle trouvaille ! Un véritable torrent de charme et de spontanéité que Cinergie a rencontré pour vous, l’accent en prime.

Cinergie : Pour commencer, on se sent obligé de vous demander comment a eu lieu la rencontre avec les frères Dardenne ?
Arta Dobroshi : Ils avaient vu les deux films que j’avais déjà faits en Albanie. Un agent à Paris m’a demandé de me rendre à un casting ouvert à travers l’Albanie, le Kosovo et la Macédoine. Je jouais alors au théâtre à Sarajevo, et je suis allée à Pristina pour des bouts d’essais. Un assistant m’a filmée pendant quelques minutes, juste le temps de dire mon nom et les seuls mots que je connaissais en français : les jours de la semaine ! Plus tard, les frères sont venus en personne à Sarajevo. Ils m’ont filmé toute une journée, en train de faire diverses activités en rapport ou pas avec le film. Ils m’ont alors demandé de venir à Liège pour rencontrer Jérémie (Rénier) et Fabrizio (Rongione), et après deux jours de travail ils m’ont dit : “Félicitations, tu es Lorna”! 

 

C. : Votre personnage vit sensiblement le même parcours. À quel point êtes-vous différente de Lorna ?
A. D. :

J’ai vécu de la même façon, solitaire, et dans les mêmes quartiers que Lorna pendant les cinq mois de tournage. Je ne voulais pas sortir en boîte ou avoir des activités que Lorna n’aurait pas faites, je ne voulais pas que ça déteigne sur elle. Chaque comédienne a sa méthode, mais moi j’aime être au plus près du personnage. J’écris sa biographie et son journal intime. Le film a été tourné chronologiquement, donc c’était vraiment comme si je vivais sa vie. 

 

C. : Comment avez-vous alors géré l’évolution du personnage vers une sorte de folie ?
A. D. : J’investis un personnage avec tout mon corps et je ne me pose pas de questions. Jean-Pierre et Luc encouragent cette vision au présent. Je n’ai pas eu à intellectualiser mon jeu, tout était très concret et direct, à tel point que ça venait naturellement.

 

C. : Le hasard a fait que lors de la présentation du film à Cannes, vous étiez la première citoyenne du Kosovo libre à représenter ce pays dans une manifestation internationale. Avez-vous senti une responsabilité particulière ?
A. D. : Non, je n’ai pas senti de pression. Comme vous dites, c’était un hasard, j’étais surtout là pour défendre le film. Nous sommes des êtres humains, c’est tout ce qui compte.
Oui définitivement. Le monde est petit, et je suis mon cœur et ma passion, peu importent les frontières. J’espère pouvoir travailler dans le monde entier, au cinéma comme au théâtre - un équilibre important pour moi.

 

C. : Votre jeune carrière est soudain devenue internationale. Vous avez envie de continuer à voyager pour votre métier ?C. : Vous êtes prête à apprendre combien de langues pour y arriver ?!
A.D.: (Rires) Pour l’instant, j’en connais quatre, mais mon arrière-grand-père en parlait neuf, j’ai encore du travail !
 Après un cours intensif de français à Berlitz pendant deux semaines, et un mois et demi de répétitions, j’ai commencé à me débrouiller.Le plus important pour moi était de sentir la langue, de me l’approprier, je me suis retrouvée en immersion, je me forçais aussi à écouter des chansons en français et, au final, j’étais bien obligée de le parler !

 

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