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Everybody Loves Touda, Nabil Ayouch, 2024

Publié le 21/11/2024 par Max Meunier / Catégorie: Critique

Cette année, Nabil Ayouch marque les esprits avec son nouveau film, Everybody Loves Touda, une œuvre poignante qui s'invite sur la scène cinématographique internationale. Sélectionné en compétition officielle au festival du Cinemamed, le film sera présenté en avant-première le lundi 2 décembre au cinéma Palace, en présence du réalisateur. Une projection supplémentaire est prévue le jeudi 5 décembre au cinéma Aventure pour ceux qui manqueront cette première occasion. Déjà auréolé de reconnaissance, le film a été dévoilé dans la prestigieuse section “Cannes Première” lors du Festival de Cannes 2024. Sa sortie en salles est prévue pour le 18 décembre 2024. Pour en savoir plus sur le festival, rendez-vous sur le site officiel du Cinemamed.

Everybody Loves Touda, Nabil Ayouch, 2024

Au cœur du film, Touda, mère célibataire et chanteuse de la Aïta, lutte pour survivre dans un Maroc tiraillé entre traditions et modernité. Ce style musical, enraciné dans la poésie populaire et historiquement associé à la résistance face à l'oppression, devient pour elle un moyen de subsistance autant qu’un stigmate. Considérée tour à tour comme une artiste ou une femme de mauvaise vertu, Touda incarne une figure complexe, tiraillée entre son désir de dignité et l’image que la société lui renvoie. 

À travers un récit empreint de réalisme, le film explore avec acuité la place de la femme dans la société marocaine. Entre les paysages âpres des campagnes de l’Atlas et la bouillonnante ville de Casablanca, Touda se débat contre une violence omniprésente, souvent silencieuse. Les choix qu’elle est contrainte de faire pour offrir un avenir à son fils muet révèlent une lutte déchirante, où chaque victoire semble entachée de solitude et de sacrifice. 

Le film frappe dès les premières images : une scène festive qui se transforme en cauchemar, posant d'emblée le ton tragique de l’histoire. Ayouch brosse le portrait d’une femme seule face à un système qui ne lui laisse que peu de place pour espérer. Le spectateur est happé dans une spirale où chaque lueur d’espoir semble vite étouffée, laissant planer la question : y avait-il seulement une chance d’y croire ? 

Alors que même en ayant, on le devine à son allure et l’encadrement, évolué dans sa classe sociale, nous sommes en droit de nous demander pourquoi Touda s’acharne tellement à devenir une artiste chanteuse de la Aïta si on ne lui reconnaît jamais son art ? Va-t-elle un jour revoir son fils qu’elle a dû laisser à ses parents le temps de démarrer sa carrière ? Et plus important encore : y a-t-il seulement une once d’espoir pour une femme de défendre une image d’indépendance sans que son corps y soit nécessairement associé ? 

Avec Everybody Loves Touda, Nabil Ayouch signe une œuvre magistrale, à la fois intime et universelle, qui ne manquera pas de faire résonner les thématiques du courage, du sacrifice et de la quête d’identité bien au-delà des frontières marocaines.

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