Kapitalistis de Pablo Munoz Gomez
Présenté à la 70e édtion du festival de Locarno où il concourait en compétition dans la catégorie "Leopardi di domani", le troisème court-métrage de Pablo Munoz Gomez est un drame burlesque touchant. Après un détour par le documentaire avec Intégration Inch' Allah (2016), le cinéaste retrouve la fiction avec ce conte de Noël singulier. Un père, livreur de pizza précaire, va essayer de trouver l'argent nécessaire pour offrir à son fils le cartable à la mode dont il rêve. Sa quête le mènera à des rencontres souvent négatives et agressives, qui ne parviendront cependant pas à le décourager. À l'instar de son court Welkom (2013), Pablo Munoz Gomez s'intéresse aux tensions communautaires et aux différences culturelles qui distillent une atmosphère de méfiance. Le corps maladroit du père, interprété avec minutie par Geroges Siatidis, révèle avec justesse les petites humiliations ressenties face à son patron, la conseillère emploi (Catherine Salée, explosive) ou l'horrible vendeur du magasin. Car sous ses dehors bon enfant, ce conte révèle la cruauté d'un système économique éreintant, montant les uns contre les autres, l'argent et son absence creusant un précipice entre les personnes qui aboutit à une réification de soi : la scène du buffet vivant, farce au goût plus qu'amer. La nationalité du père et le titre grecs du film personnifient enfin une crise qui dépasse celle de l'individu et qui, malgré la scène finale, émouvante tentative anarchiste, régit durement les relations humaines.