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Meurtres à domicile de Marc Lobet

Publié le 01/02/2008 par Sarah Pialeprat / Catégorie: Sortie DVD
Meurtres à domicile de Marc Lobet

Mon voisin le tueur

Le cinéma est jonché d’histoires sanglantes et de titres assassins. Les meurtres sont partout, à Alcatraz, dans un jardin anglais, dans la 110e rue, à la Maison-Blanche, et même au Vatican. Plus mystérieux encore lorsqu’ils sont à Manhattan.
Avec le dernier DVD de l’asbl Belfilm, pas besoin de vous déplacer, le meurtre a lieu… à domicile !
Après un conte pour enfants (Prune des bois voir webzine n°123), édité dans la collection Made in Belgium, Marc Lobet signe ici un conte pour adultes.

Par un petit matin glacial et brumeux, dans les rues sombres du vieux Bruxelles, le cinéaste Marc Lobet, et le père de Thorgal et Largo Winch, Jean van Hamme, cherchent l’hôtel de maître qui servira de décor à l’adaptation cinématographique du roman policier, Hôtel meublé, de Gérard Bertot devenu plus connu sous le nom de Thomas Owen. En passant par la rue de l’Association, construite sur le vieux quartier lépreux de Notre Dame Aux Neiges, ils aperçoivent un petit hôtel de trois étages du début du XXe siècle aux allures gothiques : c’est lui !

Ne reste plus alors qu’à y loger la galerie des personnages curieux qui hanteront les lieux pour tourner le film Meurtres à domicile. Au premier étage, seront installés Aurélia Maudru, inspectrice à la PJ (Annie Duperey), un ornithologue à horaires décalés et un laveur de cadavres sensuellement macabre répondant au doux nom d’Ange. Au deuxième, Madame Vianna chante des comptines enfantines avant d’enfoncer ses épingles dans des poupées Vaudou pendant qu'un acteur shakespearien et cabot (Bernard Giraudeau) se prépare pour son grand Othello et qu'un vieil écrivaillon frustré lit un magazine « spécialisé ». Au troisième et dernier étage, on pourra rencontrer le propriétaire rapace aux allures de vampire (Daniel Emilfork), collectionneur de mappemondes et autres Antiquités effrayantes, et enfin un sculpteur égocentrique en compagnie de son joli modèle en peignoir orange et la plupart du temps... sans. Comme l’indique le titre, le meurtre aura lieu à domicile, et c’est cette pauvre Aurélia Maudru qui devra s’y coller. Suite à l’assassinat du vieux journaliste du deuxième, elle devra affronter ses charmants voisins l’un après l’autre. Sept suspects et sept mobiles (l’argent, la vengeance, l’envie…) : rien n’est fait pour simplifier la tâche de notre inspectrice pourtant débordante de vitalité. Il faut dire qu’Annie Duperey excelle dans ce rôle de femme flic, persuasive et volontaire, qui n’hésite pas une seconde à fouiller les poubelles de l’immeuble en robe de soirée et à défoncer les portes d’un coup de revolver : non mais ! Les meurtres s’enchaînent, le cercle des suspects se restreint… l’inspectrice trépigne, l’enquête piétine, pas nous.
Marc Lobet signe ici une comédie policière d’une grande richesse picturale et remarquablement enlevée. Il a su recréer l’atmosphère cocasse et macabre à la fois du roman d’Owen pour livrer un film qui a tout d’un conte invraisemblable et totalement réjouissant. Les dialogues sont percutants, les acteurs tous excellents (notons la première apparition de Charles Berling en jeune flic hirsute) et le scénario balade le spectateur sans jamais le lâcher.
La pluie danse sur Bruxelles, l’orgue de Barbarie gémit son air lancinant, la poupée en vitrine affiche un étrange rictus, l’horloge à coucous se répand en lamentations… Qui sera le prochain ?

Meurtres à domicile -  Marc Lobet –  1982 -  84’
Scénario : Jean Van Hamme -  Images : Ken Legargeant - Montage : France Duez – Son : Ricardo Castro
Avec : Anny Duperey, Bernard Giraudeau, Daniel Emilfork, Eva Ionesco, André Bernier
Marie-Ange, Charles Dutoit, Marianne Basler, Jean-Paul Comart et Charles Berling
Production : Babylone Films, ODEC

Bonus

La présence désolée d’André Cavens – 1965 – 15’
D’après une nouvelle de Thomas Owen.
C’est Marc Lobet qui donna à André Cavens cette nouvelle extraite du recueil La cave aux crapauds. Le film qui en résulte parvient, dans un décor de fin du monde, à diffuser lentement une angoisse sourde. À la limite de l’expérimental plus que du fantastique, un film loin de toute narration et dans lequel prime l’alliance entre images et bande-son.

La fille de la Haute Dune d’Eric Stofkooper – 1987 – 10’
D’après une nouvelle de Thomas Owen.
Sur les bords de la mer du Nord, un homme esseulé se laisse entraîner par une belle jeune femme dans une étrange maison abandonnée. Ce court métrage de dix minutes nous entraîne nous aussi dans une ballade qui ne se termine pas. On y retrouve tout ce qui fait l’univers d’Owen, un entre-deux entre polar et fantastique, mort et sensualité… pour une troublante étrangeté.

Tous les films de la collection Made in Belgium sont disponibles sur http://www.belfilm.be/

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