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Par devant notaire de Marc-Antoine Roudil

Publié le 01/11/2016 par Nicolas Longeval / Catégorie: Critique

Par devant notaire de Marc-Antoine RoudilChez ces gens-là, on compte...
Village d'Auvergne. Disséminés dans les montagnes ancestrales, quelques paysans farouches. A quoi peut bien servir un notaire, dans ce trou perdu ? On se dit que ce métier ne colle pas au paysage et que le ton, simplifié, pédagogique et presque paternaliste que ce monsieur croit parfois devoir utiliser, se moque au fond de ces types un peu rustres, de ces vieillards bourrus et de leurs mégères portant le pantalon et parlant toujours en anciens francs. Pourtant prendre papy et mamie pour des naïfs serait une erreur. Sentimentaux, attachés à leurs terres ou au terroir, comme on voudra, ils le sont seulement jusqu'à un certain montant.
" C'est le commerce ! " rappelle un vieux propriétaire intraitable à son seul acheteur potentiel, plus jeune, plus mal à l'aise devant la caméra comme devant les successions de chiffres, et prêt à s'endetter auprès des banques mais dans l'impossibilité de monter encore l'enchère. La question d'argent n'est même pas arrivée jusqu'ici, elle y est sans doute depuis toujours, mais elle y apparaît d'autant plus décalée, grotesque et gelante : dans la salle d'attente, des voisins ne se parlent plus, les querelles villageoises et les vieilles histoires familiales se règlent sur papier. Quant aux héritages, ils n'ont peut-être jamais vraiment fait pleurer, et on se frotte les mains en ouvrant les tiroirs du défunt pour dresser l'inventaire. Par devant notaire ironise sans recours au commentaire : les valeurs changent, les souvenirs s'envolent. " Il faut bien avancer un peu : si j'étais vous, je vendrais ! " se permet le notaire en aparté, qui pour garder son calme triture son coupe-papier. 

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